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"Le symbole de tout ce qu'on a traversé" : Gabriella Papadakis et Guillaume Cizeron ont comblé avec brio le seul manque à leur exceptionnel palmarès en s'offrant l'or olympique aux Jeux de Pékin lundi, quatre ans après l'argent amer de Pyeongchang.
Sur la glace chinoise, Papadakis (26 ans) et Cizeron (27 ans), robe dorée à paillettes pour elle, haut rouge et pantalon noir pour lui, ont triomphé en signant un nouveau record du monde, avec 226,98 points. Derrière, les Russes Victoria Sinitsina et Nikita Katsalapov, champions du monde et doubles champions d'Europe en titre, sont repoussés à plus de six points (220,51). Les Américains Madison Hubbell et Zachary Donohue (218,02) complètent le podium.
Ce sacre olympique place Papadakis et Cizeron, déjà quadruples champions du monde (2015, 2016, 2018 et 2019) et quintuples champions d'Europe (2015-2019), tout en haut du panthéon du patinage français. Seuls Andrée et Pierre Brunet, doubles champions olympiques en 1928 et 1932 en couples, et quadruples champions du monde entre 1926 et 1932, il y a près d'un siècle, peuvent encore rivaliser.
"C'est assez indescriptible, souffle Papadakis, invitée à raconter ses émotions au moment du sacre du duo. Le temps n'existe plus vraiment. C'est ineffable !"
La preuve que le moment est unique ?
Papadakis et Cizeron, plutôt réservés habituellement, ne se font pas prier pour décrire l'avalanche d'émotions et l'immense stress ressentis, tandis que leur entraîneur Romain Haguenauer, généralement disert mais aperçu les yeux embués quelques minutes plus tôt, en perd ses mots. Nathalie Péchalat, la présidente de la Fédération française des sports de glace, elle-même ancienne danseuse sur glace, n'en finit plus de sangloter.
- "Retenu de hurler" -
"C'est comme être dans une machine à laver d'émotions, image Cizeron. Je me suis un peu retenu de hurler."
"Ca fait quatre ans, voire plus, qu'on rêve de ça. Il y a quatre ans, on savait qu'on en était déjà capable, c'était notre but, et ce n'est pas arrivé, rappelle-t-il. Cette fois, on voulait que ça arrive."
Aux JO-2018 à Pyeongchang (Corée du Sud), Papadakis et Cizeron avaient connu une mésaventure vestimentaire, quand le haut de la robe de la patineuse s'était détaché dès les premières secondes de leur danse courte. Les danseurs français avaient eu beau dominer la danse libre le lendemain, c'est autour du cou des Canadiens Tessa Virtue et Scott Moir, leurs rivaux N.1 et partenaires d'entraînement à Montréal, que la médaille d'or avait été passée.
"C'est hallucinant le poids de cette médaille aujourd'hui. Beaucoup reposait sur ce moment-là. Cette médaille, c'est un symbole de beaucoup plus de choses qu'il y a quatre ans. C'est le symbole de tout ce qu'on a traversé pendant ces quatre années, du travail qu'on a effectué, de toute notre carrière", estime Papadakis.
Les JO-2022 sont arrivés au bout d'une deuxième moitié d'olympiade pas ordinaire pour le duo clermontois : Papadakis et Cizeron sont restés vingt mois sans patiner en compétition entre leur défaite de justesse en janvier 2020 aux Championnats d'Europe - leur seule depuis les JO-2018 - et octobre dernier, principalement à cause de la pandémie de Covid-19 et des difficultés de voyage pour eux qui vivent à Montréal depuis 2014.
- Dernière saison ? -
Et, par précaution sanitaire, ils ont préféré renoncer aux Championnats d'Europe il y a un mois.
Si bien qu'à Pékin, ils se mesuraient pour la première fois depuis plus de deux ans aux tous meilleurs danseurs mondiaux. Ils l'ont fait avec maestria. Tant dans la danse rythmique samedi, dominée avec un nouveau record du monde, (90,83 contre 90,03 fin 2019), que dans la danse libre lundi, patinée au son de l'Elegie de Gabriel Fauré, jouée au violoncelle et au piano et récompensée par 136,15 points. Tout près de leur record du monde (136,58 fin 2019).
La glace française n'avait plus connu d'or olympique depuis vingt ans et le titre de Marina Anissina et Gwendal Peizerat en 2002 à Salt Lake City (Etats-Unis), déjà en danse sur glace.
Prochaine échéance pour Papadakis et Cizeron ? Les Championnats du monde dans un peu plus d'un mois à Montpellier (23-26 mars).
Et après ? Mystère pour l'heure. "Le futur n'existe pas vraiment pour l'instant", répond seulement Papadakis.
"Disons qu'on ne prend pas pour acquis que ce n'est pas notre dernière saison, résumait Cizeron à l'AFP dès le début de saison. Qu'on est plus proche de la fin que du début."
H.Sasidharan--DT