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Nathalie Péchalat va tenter de se faire réélire samedi à la tête de la Fédération des sports de glace, confiante d'avoir "remis sur les rails" une instance ébranlée par les affaires de violences sexuelles.
Arrivée au printemps 2020, la présidente sortante avait été élue à la suite de la démission houleuse de Didier Gailhaguet, accusé d'avoir couvert un entraîneur mis en cause pour viols et agressions sexuelles.
D'après la double championne d'Europe de danse sur glace, âgée de 38 ans, l'ex-homme fort du patinage français, 68 ans, tenterait d'effectuer son retour dans les coulisses de la fédération par le biais de la seule opposante en lice pour cette élection, Gwenaëlle Noury, une candidate novice.
Sollicités par l'AFP, ni Gwenaëlle Noury, ni Didier Gailhaguet, n'ont donné suite.
"Il ne lâche pas le morceau", se désole Péchalat. "Il est prêt à tout. C'est bien connu, il n'a jamais œuvré pour l'intérêt général."
"Clairement il tente de revenir par la petite porte. Il est assez incroyable, il n'a pas abandonné l'idée de revenir", souffle à l'AFP un habitué des arcanes sportives.
Dans la presse, Gailhaguet s'est toutefois défendu de vouloir peser sur l'élection. "Je n'ai rien à dire, je suis sorti de la vie fédérale (...) Je ne suis candidat à rien", a-t-il dit au JDD.
Gailhaguet a régné sur les patinoires presque sans discontinuer pendant plus de deux décennies. Mais après la déflagration causée par des accusations de violences sexuelles dans le sport, son sixième mandat avait pris fin soudainement en 2020.
L'ex-championne de France Sarah Abitbol avait accusé de viols et d'agressions sexuelles son ancien entraîneur Gilles Beyer alors qu'elle était adolescente. Mis en cause pour sa proximité avec Beyer, Gailhaguet avait été appelé à la démission par la ministre des Sports de l'époque, Roxana Maracineanu.
- "Cheval de Troie" -
A peine élue, la nouvelle équipe fédérale avait fait voter de nouveaux statuts limitant à trois le nombre de mandats et le rendant de fait inéligible au poste de président.
Malgré cela, rien ne lui interdit d'occuper d'autres fonctions au sein de la Fédération.
Depuis plusieurs semaines, selon Péchalat, il s'activerait donc en coulisses pour faire élire la seule opposante de la présidente sortante, Gwenaëlle Noury, présidente du club de patinage de Lorient.
Pour le camp Péchalat, Gwenaëlle Noury serait le "Cheval de Troie" de Gailhaguet. "Comme il est inéligible, l'idée c'est de faire en sorte qu'elle soit élue présidente de la fédération et puis qu'il se fasse nommer secrétaire général ou directeur général et qu'il puisse contrôler tout ce qui se passe à la fédération", explique Péchalat.
"Il est actif, il est en campagne, il fait le tour de France, il appelle tout le monde", détaille-t-elle.
Pour convaincre les votants, qui seront réunis samedi au siège du Comité olympique français (CNOSF), Péchalat défend son bilan, estimant avoir redoré l'image de la fédération, notamment auprès des instances nationales, comme l'Agence nationale du sport ou le ministère, et internationales.
Elle dit aussi avoir remis la fédération sur les rails après deux années de crise sanitaire. "On a beaucoup souffert du Covid, (...) (mais) les choses se sont consolidées et on sort vraiment du tunnel", affirme-t-elle, se félicitant d'avoir attiré notamment la banque CIC comme nouveau sponsor.
- "Retour en arrière" -
Mais le dossier le plus sensible dont avait hérité la fédération à son arrivée concernait les violences sexuelles.
"On est partis d'une telle page blanche que tout était à construire", dit-elle. "J'avais déjà des idées sur ce que je voulais mettre en place donc on a créé un comité éthique, on a réactivé la commission disciplinaire. On a créé la commission disciplinaire d'appel, la fiche de signalement pour que les témoins, les victimes puissent s'exprimer."
"On a essayé à la fois de sanctionner quand c'était nécessaire, et puis surtout d'outiller tous les encadrants sur les méthodes appropriées ou inappropriées", ajoute-t-elle.
Avant l'élection elle dit faire "confiance" aux présidents de clubs qui seront appelés à voter en assemblée générale. "Je pense qu'ils sont au courant que ce serait catastrophique pour notre fédération de faire ce retour en arrière, de dégager d'un revers de main tout ce qui a été fait, notamment sur tout le relationnel avec les instances nationales et internationales", déclare-t-elle.
Depuis son départ forcé, Gailhaguet a en tout cas obtenu une victoire symbolique en faisant condamner l'Etat à lui verser 5.000 euros au titre du préjudice moral pour avoir fait pression pour obtenir cette démission.
A.Ansari--DT