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Sans égal sur terre battue, où il a décroché dimanche un faramineux 14e titre à Roland-Garros, Rafael Nadal a étendu sa domination à toutes les surfaces grâce à son inoxydable mental et sa résilience face aux blessures.
Avec ses 22 sacres en Grand Chelem, l'Espagnol devance désormais de deux longueurs ses grands rivaux Novak Djokovic et Roger Federer (vingt Majeurs chacun).
"Rafa" écrase la concurrence sur l'ocre depuis près de vingt ans, mais réduire sa palette à cette couleur serait une erreur.
Sur dur à Melbourne, il ne s'est imposé que deux fois, mais possède l'un des meilleurs ratios victoires/défaites. En Australie, en début d'année, il est devenu le deuxième joueur de l'ère Open (depuis 1968) à remporter au moins deux fois chacun des quatre tournois du Grand Chelem, après Djokovic.
Avec 92 trophées, le trône de N.1 mondial occupé pendant 209 semaines, cinq Coupes Davis et deux médailles d'or olympique, en simple et double, il possède, à 36 ans (il les a fêtés vendredi), l'un des palmarès les plus foisonnants, avec ceux de Djokovic et Federer.
Lui-même place au-dessus ses deux victoires sur le gazon de Wimbledon en 2008 et 2010, surtout la première, conquise dans un match de légende contre le champion suisse, coauteur avec lui d'un des feuilletons les plus passionnants de l'histoire du sport.
C'est sur la terre battue, le terrain le plus exigeant pour la tête et les jambes, que son art a atteint sa perfection. Depuis plus d'une décennie, d'avril à juin, il est presque imbattable grâce à son énorme lift et à ses glissades: 473 matches gagnés sur 519 disputés, soit 91% de succès.
- Bête de combat -
Ses triomphes parisiens, de 2005 à 2008, de 2010 à 2014, de 2017 à 2020 et donc en 2022, sont ses chefs-d'oeuvre. Aucun champion n'a jamais réussi à gagner autant de fois un même tournoi du Grand Chelem.
Personne non plus n'a jamais remporté 81 matches de suite sur terre battue, record établi entre avril 2005 et mai 2007, ni empilé 62 titres sur cette surface.
Né d'une mère commerçante et d'un père chef d'entreprise à Manacor, la troisième ville de Majorque, île à laquelle il reste passionnément attaché, Nadal a passé son enfance dans un immeuble où logeait toute sa famille. Ou plutôt son clan, tant un esprit de corps à la méditerranéenne soudait ses membres - à cet égard la séparation de ses parents, en 2009, a été une rude épreuve.
Ses oncles ont eu une importance décisive: Miguel Angel Nadal, le footballeur du FC Barcelone, qui lui a fait prendre conscience très jeune des exigences du sport professionnel, et surtout Toni, son mentor de l'âge de 4 ans jusqu'à 2018 (quand son compatriote et ami Carlos Moya a pris la relève).
Sous la férule de cet entraîneur, "le plus sévère qu'on puisse imaginer", le petit prodige a sué sang et eau au club de tennis juste en face de la résidence familiale. "Il me mettait une pression très forte, usait d'un langage brutal, criait souvent ; j'avais peur de lui", raconte le joueur.
D'après Toni, c'était le prix à payer pour transformer un garçon plutôt timide et craintif en bête de combat sur le court. Et aussi en gentleman : "interdiction absolue de jeter sa raquette".
- "Immergé dans son tennis" -
Moins doué techniquement que Federer - même s'il ne faut pas sous-estimer l'habileté de sa patte gauche, qu'il n'utilise que pour jouer au tennis, étant droitier - Nadal a triomphé grâce à son mental, à cette "capacité à accepter les difficultés et à les surmonter supérieure à celle de la plupart de (ses) rivaux", dit-il, et à son exceptionnel pouvoir de concentration, lorsqu'il est "entièrement immergé dans (son) tennis solitaire, avec un sentiment de vie intense".
Mais son corps a souvent été son pire ennemi. Dès 2006, il s'est cru perdu à cause d'une malformation congénitale (syndrome de Müller-Weiss) au pied gauche qui l'a obligé à porter des chaussures sur mesure. Cette douleur qui va et vient sans jamais disparaître est devenue franchement handicapante ces derniers mois. Au point que le doute plane sur son retour ou non en 2023.
Des problèmes au genou et au poignet l'ont également tenu éloigné des courts pendant de longues périodes.
Cet homme immensément riche (près de 130,5 millions de dollars de gains, sans compter les revenus publicitaires) et célèbre se décrit comme un homme ordinaire qui n'aime rien tant qu'aller à la pêche avec ses amis, regarder des matches de football - qu'il préférait au tennis étant enfant - et passer du temps avec son épouse Francesca, une Majorquine dont il partage la vie depuis 2005.
F.El-Yamahy--DT