AEX
-1.1200
Après avoir longtemps tourné autour, Victor Campenaerts a gagné pour la première fois sur le Tour de France jeudi à Barcelonnette, "le rêve d'une vie" qu'il a aussitôt partagé par visio avec sa compagne, "l'héroïne du jour", et son nouveau-né.
Un tourbillon de pure émotion a soufflé sur la Grande boucle lorsque le Belge de 32 ans s'est jeté sur son téléphone quelques secondes seulement après avoir battu au sprint le Français Mattéo Vercher et le Polonais Michal Kwiatkowski à l'issue d'une échappée fleuve.
Encore assis sur son vélo, il a appelé sa famille en visio et a pu voir sa compagne qui lui montrait leur jeune fils Gustaaf, né juste avant le début du Tour.
Les larmes ont alors coulé à flot. Et c'est toujours avec des sanglots dans la voix que le coureur de l'équipe Lotto a ensuite raconté pourquoi il était si ému lors d'une interview protocolaire rappelant celle, tout aussi forte, de Matej Mohoric l'an dernier.
Il y a le fait de gagner sur le Tour de France bien sûr, "le rêve de tous les coureurs".
"Je ne suis pas un néo-pro et j'en rêvais depuis très très longtemps", a expliqué "Campi" après avoir reçu l'accolade de Remco Evenepoel, arrivé dans le peloton maillot jaune avec plus de treize minutes de retard après une journée tranquille pour les favoris.
Mais pour le Flamand moustachu, ancien détenteur du record de l'heure, la victoire avait aussi un goût de revanche et de rédemption après un printemps "très difficile".
- "Je vais partir" -
"J'avais un accord verbal avec l'équipe pour prolonger mon contrat et on m'a ignoré. C'était très difficile, je suis parti en camp d'altitude pendant neuf semaines, j'avais du mal à finir mon programme d'entraînement. Heureusement ma compagne était là alors qu'elle était sur le point d'accoucher. Elle est toujours là pour moi. C'est elle l'héroïne du jour."
La naissance de son fils, "au pied d'un col de la Sierra Nevada" espagnole, a tout changé. "Le ciel est redevenu bleu, très bleu. J'ai repris du plaisir sur le vélo."
Dès lors son état d'esprit "a complètement changé, j'ai encore un grand avenir dans le cyclisme, et je vais changer d'équipe", a ajouté Campenaerts, en partance pour l'équipe Visma-Lease a bike.
Si ces relations avec Lotto ont été compliquées au printemps, il a cependant tenu à dire que l'ambiance au sein de l'équipe retenue pour le Tour était "excellente".
"Je vais partir mais je suis heureux que ça se termine sur le point d'orgue de ma carrière. On va célébrer ce soir", a souligné Campenaerts, un personnage attachant du peloton qui tient un journal de bord hilarant sur Instagram pendant le Tour.
"C'est exceptionnel pour nous et c'était un rêve pour lui" a applaudi son leader, le jeune Arnaud De Lie. "Il disait: +l'étape 18 nous sourit souvent+. Et le con il l'a fait."
Campenaerts, un gros rouleur qui avait déjà gagné sur le Giro et plusieurs chronos, avait de fait coché cette étape depuis "le mois de décembre".
- "Je l'ai joué un peu sale" -
Pour décrocher le graal, il a d'abord réussi à se glisser dans une échappée de 36 coureurs qui a ouvert la route dans un décor de carte postale le long du magnifique lac de Serre-Ponçon.
Il a ensuite suivi, en compagnie du Français Mattéo Vercher, l'expérimenté Michal Kwiatkowski lorsque celui-ci a accéléré à une trentaine de kilomètres de l'arrivée
Il a enfin rusé pour faire croire qu'il était cramé, à grand renfort de grimaces et de soufflements de boeuf. "Je l'ai joué un peu sale", a-t-il reconnu avant de battre sans contestation possible ses deux compagnons grâce à un sprint tout en force.
Vercher, pour son premier Tour de France, a estimé avoir été "battu par plus fort" alors qu'il était tombé lui-même pendant le départ fictif. Mais le Lyonnais de 23 ans, qui court pour l'équipe TotalEnergies, était très déçu d'être passé si près d'une première victoire retentissante chez les pros, lui le champion de France amateurs en 2022.
D'autant que c'était sans doute la dernière étape pour les baroudeurs car les favoris vont à nouveau entrer en action vendredi lors de la première des deux étapes dans les Alpes qui devraient décider du sort de cette 111e édition.
Pour Campenaerts, l'essentiel était ailleurs jeudi soir. "Dans trois jours je vais voir Gustaaf", a-t-il bredouillé les yeux humides.
S.Saleem--DT