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Jo-Wilfried Tsonga, qui prendra sa retraite après Roland-Garros, à 37 ans, jettait un œil critique sur son parcours en février dans une interview à l'AFP, expliquant que le Big Four (Federer, Nadal, Djokovic, Murray) "récupérait mieux que (lui)".
QUESTION: Vous avez battu Federer, Nadal et Djokovic à leur meilleur niveau. Si les jeunes n'arrivent pas à s'imposer alors que le "Big 3" s'approche de la fin de carrière, cela signifie-t-il que le niveau a baissé ?
REPONSE: "Ce sont des joueurs exceptionnels depuis qu'ils ont 18 ans. Donc il y a le niveau de jeu, mais il y a aussi l'expérience. Aujourd'hui, ils jouent contre des joueurs à armes égales, sauf qu'ils ont l'expérience. Pour l'instant, ces gars-là sont loin devant et vont le rester une vingtaine d'années, voire un siècle ou peut-être plus, parce que le temps que quelqu'un d'autre arrive à 21 titres du Grand Chelem (comme Nadal)..."
Q: Que vous a-t-il manqué pour décrocher un titre majeur, malgré une finale en Australie en 2008 contre Djokovic ?
R: "Pas grand-chose. En un, physiquement: j'étais capable de grandes performances physiques, mais je récupérais moins bien qu'eux. Je faisais une grande performance mais quand je devais rejouer deux jours après, j'avais des courbatures, des fois des déchirures, mal partout... Sur un match j'étais compétitif avec eux, des fois meilleur. Mais pour enchaîner... Quand vous sortez d'un match contre Rafa, et si vous voulez le battre, au minimum ça va durer 4h30, il faut recommencer deux jours après contre Djokovic, et si vous passez contre Djokovic, il faut retourner deux jour après contre Federer. En deux, il m'en a manqué un peu techniquement. Et s'il devait y avoir du mental, c'était en dernier. Parce que moi, je n'attendais qu'une seule chose quand je jouais contre eux, c'était d'être dans le +money time+. Quand ça commence à compter, j'ai le regard qui change, je deviens celui que je dois être, mais que j'ai du mal à trouver."
Q: Les joueurs français savent-ils se faire suffisamment mal pour gagner ?
R: "Moi, j'ai fait une médaille d'argent aux Jeux avec le doigt cassé (en double en 2012 à Londres, NDLR)... Ce n'est pas ça le fond du problème. On dit toujours que les joueurs français sont gâtés pourris. Moi, je ne suis pas un gâté pourri! Je viens de la campagne, mon papa est un immigré, mes parents ont toujours vécu à crédit. J'ai eu une éducation non pas stricte et rigide, mais droite. Et aujourd'hui, qui est prédestiné ? Un petit gars tout seul, parti de chez lui, mais qui a été 5e mondial, qui a fait une finale en Grand Chelem, qui est aujourd'hui un investisseur ? Rafa, son oncle était un grand joueur du Barça, son père est un entrepreneur renommé, ils habitent un endroit où il y a la mer juste en bas de sa chambre, il a un terrain de tennis dans son jardin, et on ne dit pas qu'il est gâté ? Mais nous, on vient toujours nous briser, nous dire qu'on n'est pas bons, qu'on n'a pas de mental..."
Q: C'est pour ça que vous investissez du temps auprès des jeunes ?
R: "Entre autres, oui. Je sais ce que c'est que d'être joueur de tennis. De base, c'est être un loser. Quand on joue au tennis, on perd toutes les semaines. Federer a perdu plus de semaines qu'il en a gagné. Quand tu as perdu, il faut qu'on te dise: +Tu as perdu, ah bon? Ben relève toi, il y a un autre match. Demain, ça recommence. Et prépare toi parce que tu vas perdre encore. Tu vas perdre aujourd'hui, demain, après-demain...+ C'est ça notre métier, c'est ça le tennis. C'est accepter de perdre et se dire +Demain j'y retourne pour gagner+. En France, on aime mettre les gens dans des cases: +Jo-Wilfried Tsonga, il est trop gros+. Pour Gilles (Simon), on a dit: +Il a exploité son potentiel à 100%+. Mais c'est hyper limitant ça, ça veut dire qu'il ne peut pas aller plus haut ! C'est toutes ces petites barrières dans la tête, tout le temps..."
U.Siddiqui--DT