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Les cheveux étaient un peu plus longs et la taille des bras moins imposante lorsque Antoine Dupont et Anthony Jelonch, à peine majeurs, ont débarqué ensemble à Castres, où ces deux "bijoux" du rugby français ont été polis avant d'éclore au plus haut niveau.
"Ils sont arrivés avec leurs cheveux longs, leurs 17 ans. Ils étaient jeunes et tout timides", se rappelle auprès de l'AFP Victor Moreaux, leur ancien coéquipier au Castres Olympique, que les deux cadres du XV de France retrouveront samedi sous un autre maillot, celui de Toulouse, à l'occasion de la 22e journée du Top 14.
"Antho (Jelonch), c'était une mante religieuse", s'amuse le deuxième ligne, désormais au Racing 92. "Il ne ressemblait à rien dans le haut du corps, mais il a toujours eu de grosses jambes. Et Toto (Dupont) n'a pas changé. C'est un naturel, un petit taureau".
Thierry Bourdet s'occupait des espoirs castrais à l'époque, en 2014. Lui aussi se souvient de garçons, formés à Auch, encore "frêles physiquement, comme tout joueur qui intègre une structure professionnelle".
Dupont et Jelonch étaient en revanche pour lui "au-dessus du lot" d'un point de vue rugbystique. Le demi de mêlée donnait déjà le tournis aux défenses adverses et le troisième ligne ne refusait pas le combat. "J'avais rarement vu à cet âge-là un garçon avec de telles qualités défensives".
Ce potentiel avait été décelé par plusieurs écuries du Top 14. L'un des entraîneurs de Castres, Serge Milhas, ancien joueur d'Auch qui connaissait les familles des deux jeunes, les a convaincus de rejoindre le CO, un club en adéquation avec leurs valeurs.
"Ils sont très attachés à leur terroir, à leur famille", explique Bourdet à l'AFP. "Castres leur correspondait bien, un peu dans le même registre qu'à Auch. C'était un bon tremplin, ça leur a permis d'éclore tranquillement".
- "Toto le sérieux" -
"On ne s'est pas trompé de destination", confirmait Dupont en décembre dernier dans une vidéo en compagnie de Jelonch produite par l'agence "Bros. Stories", qui gère la communication du demi de mêlée des Bleus.
"A 17-18 ans, quand tu dois franchir le cap ou non, le choix de carrière est déterminant pour ne pas se planter", développait-il. "Tu avais des clubs qui faisaient rêver. On aurait pu y aller, mais on n'aurait peut-être pas joué, on n'aurait pas éclos".
Pas encore majeur, "Toto" a eu besoin d'une dérogation pour disputer son premier match pro à l'automne 2014 en Coupe d'Europe contre le grand Leinster. Le troisième ligne gersois a mis un peu plus de temps à percer, mais il n'a plus quitté l'équipe première de Castres une fois qu'il y a été invité.
Ces "opportunités" leur ont permis de prendre "confiance en eux", affirme Moreaux. "Peut-être qu'en rejoignant plus tôt le Stade toulousain, ils n'auraient pas été lancés aussi tôt. Tout s'est bien goupillé pour eux".
Après avoir partagé leur chambre à l'internat à Auch, les deux amis ont vécu en colocation pendant leurs années castraises. "Tout le monde était bienvenu, ils étaient très accueillants, avec de bons produits du Gers", raconte leur ancien coéquipier.
"Dans la coloc, c'était Toto le sérieux et Antho le vadrouilleur. Il a toujours été plus bringueur", ajoute-t-il. "Malgré sa petite taille, Toto gérait le sérieux de tout ça".
Les deux derniers capitaines des Bleus, partis de Castres en 2017 et 2021, y reviennent samedi avec un tout autre statut et sous les couleurs de l'ennemi juré toulousain.
"Ils sont partis en bons termes, ça fait partie d'une suite logique dans leur progression", souligne Bourdet. "C'est une fierté de les avoir eus chez nous. Des joueurs comme ça, on n'en a pas tout le temps. On se dit qu'on a eu deux bijoux".
D.Naveed--DT