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Auteur d’exploits époustouflants en flirtant avec les limites de l’extrême, Fred Fugen éprouve désormais le "besoin de se poser" pour savoir "jusqu’à quel point ça vaut le coup d’aller", après le décès de son alter ego, Vince Reffet, a-t-il confié dans un entretien à l'AFP.
Tous deux accros au parachutisme, Fred Fugen et Vince Reffet s'étaient rencontrés il y a plus de vingt ans pour composer un duo connu sous le nom des Soul Flyers et auteur de performances repoussant sans cesse les limites du possible.
Ils ont allié toutes sortes de disciplines à fortes sensations, comme le vol en wingsuit, le speedriding, la chute libre, jusqu'à s'investir dans un projet encore plus innovant: voler vêtu d'une combinaison ailée et équipée de mini réacteurs (Jetman).
"C’est 20 ans, t’imagine...", glisse Fugen, rencontré lors d'une session d'entraînement pour son dernier opus vidéo (une chute libre depuis 6500 m d'altitude chaussé de skis avant de dévaler la montagne en speedriding), à La Clusaz, station à jamais dans le coeur du tandem où ils ont fait leurs classes.
Fugen n'a pas cessé de s'entraîner pour ce projet qui lui "tient particulièrement à coeur", parce qu'il avait été pensé et déjà préparé il y a quatre ans avec Vince Reffet, disparu le 17 novembre 2021 à Dubaï lors d'un accident d'entraînement pour le projet Jetman.
- "Pas une journée" -
"La manière qu’on avait de penser ensemble aux choses. Des fois, y a des trucs que j’aurais peut-être pas faits et comme je sais que lui l’aurait fait, alors maintenant je le fais parce que je suis tout seul. Il n'y a pas une journée qui passe...", dit-il avant de s'interrompre, puis de reprendre.
"Dans chaque phase d’entraînement j’étais constamment en train de penser à Vince, je pouvais quasi imaginer les discussions qu’on aurait eues".
Après le décès de son ami, Fugen a passé une année entière à enchaîner les exploits sans prendre le temps de se poser ni de réfléchir. "C’est peut-être ce qui est en train d’arriver là".
"L’année dernière a été particulière pour moi. Là, j’ai du travail personnel à faire, il y a plein de choses qui changent, le contrat Jetman qui s'arrête. Après qu’est-ce qui va se passer derrière ? J’arrive à un point où il va falloir que je prenne du temps".
"Faire des trucs tout seul, c’était quelque chose qui me faisait flipper, il a fallu que j’en fasse plein comme s’il fallait que je me prouve et que je prouve aux autres aussi qu’en fait j’arrivais à faire des trucs tout seul", glisse Fugen.
A-t-il désormais plus peur, depuis la perte de son ami ?
- "Où est la limite?" -
"Je sais pas trop. Pas vraiment parce qu’on faisait déjà tellement attention, les conditions dans lesquelles il est mort sont tellement particulières, l’exercice spécifique qu’il était en train de faire en Jetman c’est un truc pour lequel moi je n’avais pas le niveau.... C’est un autre monde. Je ne me dis pas que j’ai davantage peur mais peut-être que j’ai plus de facilités à m’arrêter un peu plus tôt, à moins pousser".
La mort de Vince, "c’est très particulier pour moi". "T’essaies d’en tirer des leçons, de comprendre des choses. Y a une réflexion, je suis peut-être pas encore arrivé au bout de ce truc là... Mais ouais, faut faire gaffe. Et faut savoir jusqu’à quel point ça vaut le coup d’aller. Tu vis aussi la douleur des gens qui sont autour, sa femme, ses parents. Ce matin j’ai vu ses parents, c’est chaud... C’est presque pire que tout. Ceux qui restent", souffle-t-il.
Vince Reffet est décédé après avoir perdu le contrôle de son appareil en vol stationnaire (Jetman) et n'avait pas déployé son parachute de secours, selon les conclusions d'une enquête.
Et aujourd'hui, pour Fugen il s'agit de "mesurer plus le truc pour prendre du plaisir encore sans se faire peur": "Où est la limite ? Ca vient du fait aussi que Vince soit mort, à un moment tu imagines le pire, maintenant on sait que le pire peut arriver".
U.Siddiqui--DT