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Il est l'homme derrière l'incroyable succès du biathlon masculin français: l'ancien fondeur Vincent Vittoz a bâti en l'espace de quatre ans une formidable machine à gagner en misant sur une préparation physique exigeante.
Quand le champion du monde de poursuite de ski de fond en 2005 a débarqué à la tête des Bleus en 2018, la discipline n'existait en France que par le truchement du roi Martin Fourcade, quintuple médaillé d'or olympique et septuple vainqueur de la Coupe du monde. Le Pyrénéen est parti à la retraite en 2020, mais l'équipe de France est quand même resté au sommet et s'est même découvert un nouveau leader incontestable, Quentin Fillon Maillet, signe de l'efficacité de la méthode Vittoz.
Celle-ci se résume en un mot: souffrance. Sa voix douce et calme tranche singulièrement avec son approche de l'entraînement et de la préparation physique, beaucoup plus stricte que celle de son prédécesseur, Stéphane Bouthiaux, promu directeur des équipes de France. Celui qui a gardé sa silhouette de sportif de haut niveau ne badine pas avec le foncier, "primordial pour tenir toute la saison".
Ce mode de fonctionnement n'a pas été institué sans anicroche. Fourcade, façonné par Bouthiaux, a ainsi mis un an avant d'assimiler les préceptes du nouveau patron des Bleus, connaissant d'abord de sérieuses difficultés sur les skis en 2018-2019, avant de se relancer la saison suivante et d'être à la lutte pour le gain du Gros globe de cristal avec le futur lauréat Johannes Boe jusqu'à la dernière course de son immense carrière.
- Philosophie héritée du fond -
Mais au-delà de Fourcade, la patte Vittoz a irrigué l'ensemble du groupe, aujourd'hui d'une densité exceptionnelle avec deux Français aux deux premières places de la Coupe du monde (Quentin Fillon Maillet devant Émilien Jacquelin) et un autre dans le Top 10 (Simon Desthieux 9e).
L'intéressé a toujours refusé le terme de "révolution" pour qualifier la rupture avec le passé. L'idée pour lui était surtout d'amener une nouvelle "dynamique" et de prévenir une certaine "usure" dans les séances, selon Martin Fourcade.
Vittoz (46 ans) a simplement souhaité transposer au biathlon une philosophie héritée de ses années de fondeur.
"Pour moi, ce n'est pas nouveau, le ski de fond français travaille comme ça depuis 15 ans, affirme l'ancien entraîneur des Espoirs en ski de fond. Le point commun des fondeurs français qui ont gagné en Coupe du monde, c'était un gros travail automnal au niveau du foncier. Cela faisait 10 ans que les biathlètes étaient dans un même schéma de musculation. J'ai essayé d'amener de la variété dans les exercices. Les athlètes étaient demandeurs."
La métamorphose de Fillon Maillet et l'éclosion de Jacquelin sont clairement à mettre à son crédit.
- "Émulation collective" -
"Il nous a fait faire parfois des choses qui sont dures à l'entraînement, mais une fois qu'on démarre les courses, on sait pourquoi on a vraiment souffert et pourquoi il nous a poussés à ces moments-là", insiste Fillon Maillet.
"C'est quelqu'un qui se donne à 100% et il a changé beaucoup de choses dans l'équipe, estime Raphaël Poirée, quadruple vainqueur de la Coupe du monde au début des années 2000 et première star du biathlon français. Il a été complémentaire avec Bouthiaux. Il est arrivé dans une équipe avec des athlètes qui avaient déjà un gros moteur mais il a fallu qu'ils adhèrent à ses demandes. Il est très posé et il a une expérience de la haute compétition et ça a poussé un peu tout le monde. C'est une émulation collective".
Vittoz forme également un duo très complémentaire avec Patrick Favre, arrivé en même temps que lui chez les Bleus pour s'occuper du tir. L'Italien (49 ans), plus discret que son compère, vient lui du biathlon (il a été vice-champion du monde du sprint en 1999) et a su initier Vittoz aux spécificités de la discipline.
"Cela fait quatre ans que l'on construit ce collectif et on a désormais une superbe équipe avec des personnalités et des profils différents", savoure Vittoz. Ces JO de Pékin et la razzia des Français en sont la parfaite illustration.
C.Akbar--DT