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"L'étape la plus importante de la +skincare+ routine, c'est la crème solaire." Sur les réseaux sociaux, de nombreux influenceurs appellent à appliquer quotidiennement de la crème solaire, une tendance avant tout marketing mais inutile voire risquée pour la santé.
Protection contre les UV, remède anti-rides, ou gage d'élasticité de la peau: les bienfaits promis sont alléchants alors que l'exposition au soleil est le principal responsable des cancers de la peau.
Néanmoins, l'utilité d'appliquer de la crème solaire tous les jours est loin d'être prouvée.
"Ce n'est absolument pas nécessaire", soutient ainsi Céline Couteau, docteure en pharmacie et spécialiste en cosmétologie. "Il faut surtout surveiller l'indice UV. A 0 ou 1 - comme en ce moment -, il n'est pas utile de se protéger contre une menace qui n'existe pas", déclare-t-elle à l'AFP.
Et même s'il a été prouvé que l'application d'un écran solaire diminue le vieillissement cutané, de la même façon que pour la prévention des cancers cutanés, "cela n'est vrai que si l'on s'expose au soleil", poursuit la chercheuse.
Surtout, les personnes qui relaient cette mode omettent souvent de mentionner les potentiels effets néfastes sur la peau et sur le santé de la pénétration des filtres solaires.
- "Argument de vente" -
Au-delà des risques d'intolérance, d'irritation ou d'allergie, "certains filtres utilisés sont suspectés d'être des perturbateurs endocriniens, voire cancérigènes", signale Céline Couteau, comme l'oxybenzone ou l'octocrylène dont les limites maximum de concentration ont été diminuées par la Commission européenne.
"Le problème est qu'on manque de données", déplore Jean-David Zeitoun, docteur en médecine et docteur en épidémiologie clinique.
"On ne sait pas si le fait d'appliquer de la crème solaire, en plus de ce qui est indispensable, est contrebalancé ou non par les effets hormonaux et environnementaux liés aux produits chimiques contenus dans ces produits", poursuit-il.
En période estivale, aux heures les plus chaudes, pour les enfants, "il n'y a pas de question à se poser, il faut obligatoirement utiliser de la crème solaire", rappelle Céline Couteau, "mais quotidiennement, absolument pas".
Cette tendance s'est pourtant propagée depuis plusieurs années y compris dans tous les produits cosmétiques.
Crème hydratante, fond de teint, poudre, blush... presque tous promettent désormais une protection solaire et affichent un facteur de protection solaire (FPS).
"C'est un réel enjeu pour le secteur industriel de la cosmétique. De plus en plus de marques se positionnent sur ce marché", commente auprès de l'AFP Erwan Poivet, conseiller scientifique à la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA).
Mais ces produits ne peuvent pas être considérés comme de réelles protections solaires.
"Il s'agit surtout d'un effet esthétique car les UV entraînent un vieillissement de la peau. L'intérêt du SPF ici, c'est uniquement de vous promettre de garder une peau jeune", souligne Erwan Poivet.
Problème: nombre de professionnels redoutent que ces produits entretiennent une confusion chez les consommateurs.
"C'est un bel argument de vente mais le risque est que cela induise en erreur les personnes qui s'imaginent que cela est suffisant pour être protégé", relève Christophe Bedane, professeur de dermatologie au CHU de Dijon.
- Simplifier l'étiquetage -
En vue de la révision de la recommandation de l'UE aux industriels "sur les allégations de sécurité et d'efficacité" de ces produits qui date de 2006, l'Anses a d'ailleurs préconisé de supprimer toute mention d'une protection solaire sur l'emballage des produits cosmétiques intégrant un filtre UV.
"Ce produit est appliqué une fois par jour, avec une quantité appliquée plus faible. Au contraire, un produit de protection solaire nécessite l'application d'une quantité suffisante et une ré-application dans la journée pour être pleinement efficace", développe l'agence sanitaire.
Opposé à la suppression de cette mention, Erwan Poivet concède qu'elle nécessite plus d'explications.
"Il faut qu'un scénario d'explication soit défini sur le packaging afin de mieux accompagner le consommateur", soutient-il.
Pour les crèmes solaires, l'Anses recommande également de simplifier l'étiquetage en ne conservant que trois catégories de protection: "Faible, moyenne ou forte".
Pour Céline Couteau, il s'agit aussi de "rééduquer les gens" et d'arrêter de leur faire croire qu'une crème solaire "est un mur de béton".
"Une crème solaire permet de limiter les dégâts mais ça ne les réduit jamais à zéro."
X.Wong--DT