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A un mois seulement, Ayansh Tiwari porte déjà un masque nébuliseur sur son petit visage, souffrant de difficultés respiratoires que les médecins imputent à l'inhalation de l'air toxique qui, chaque hiver, empoisonne la capitale indienne.
L'état alarmant du petit Ayansh contraint ses parents à le conduire aux urgences de l'hôpital gouvernemental Chacha Nehru Bal Chikitsalaya.
Comme lui, tous les enfants dans cette salle spartiate des urgences peinent à respirer. Beaucoup souffrent d'asthme et de pneumonie.
Ces affections augmentent avec les pics de pollution atmosphérique alimentée par les brûlis agricoles, les émissions industrielles et du transport routier dans la mégapole de 30 millions d'habitants.
"Il est partout ce brouillard empoisonné", déplore Julie Tiwari, maman de Ayansh qui tousse dans ses bras.
Jeudi, le niveau de PM 2,5, microparticules cancérigènes qui pénètrent les poumons et le sang, s'élève à 390 microgrammes par mètre cube d'air, soit 25 fois le niveau quotidien maximum fixé par l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
- Maladies respiratoires -
"J'essaie de garder les portes et les fenêtres fermées autant que possible. Mais on respire du poison tout le temps. Je me sens si impuissante", confie à l'AFP la jeune mère de 26 ans, au bord des larmes.
Une étude publiée en 2020 par The Lancet, une revue médicale, imputait 1,67 million de décès, un an plus tôt, à la pollution de l'air en Inde, dont près de 17.500 dans la capitale.
"C'est une cohue à rendre fou dans nos urgences à cette période", lâche le docteur Dhulika Dhingra, pneumologue pédiatrique et directrice de l'hôpital.
Les enfants sont plus vulnérables à la pollution atmosphérique car leur cerveau et leurs poumons, entre autres organes vitaux, ne sont pas pleinement développés, explique le médecin.
Selon une étude publiée dans la revue Lung India en 2021, près d'un écolier sur trois à Delhi souffre d'asthme et d'obstruction des voies respiratoires.
En outre, la fréquence respiratoire des enfants est plus élevée que celle des adultes, ce qui signifie qu'ils inhalent davantage d'air toxique, poursuit le Dr Dhingra.
"Ils ne tiennent pas en place, ils s'agitent et courent et la fréquence respiratoire augmente en parallèle. Ce qui les expose davantage aux effets de la pollution", explique-t-elle. "Cette saison est très difficile pour eux, ils peuvent à peine respirer."
Mohammad Akhlad, un bébé de 11 mois, souffre d'une pneumonie depuis huit jours.
"C'était un enfant tellement heureux. Il ne fait que pleurer et tousser ces derniers jours", s'inquiète sa maman, Chandni Begum, le nourrisson, apathique et pâle, sur ses genoux.
"Nous ne pouvons échapper à ce poison dans l'air qui nous rend malade", ajoute cette femme au foyer vivant dans l'un des bidonvilles de la ville.
Comme tous ces parents qui se pressent dans les couloirs de l'hôpital, où les traitements et les médicaments sont fournis gratuitement, elle ne peut débourser des soins dans une clinique privée ni s'offrir un seul purificateur d'air.
Selon Seema Kapoor, pédiatre et directrice de l'hôpital, l'affluence des malades est constante depuis que les températures ont chuté et que les polluants stagnent plus près du sol.
"Les maladies respiratoires représentent de 30 à 40% de la fréquentation totale", dit-elle.
- Air vicié et pauvreté -
Pour le docteur Dhingra, le seul conseil à donner aux parents est d'empêcher autant que possible les activités de plein-air de leurs enfants.
"Vous vous rendez compte: dire à un parent de ne pas laisser son enfant sortir et jouer à cause de cet environnement toxique."
Le gouvernement de Delhi a annoncé la fermeture d'urgence des écoles, l'arrêt des chantiers de construction et l'interdiction de la circulation des véhicules diesel.
Mais les brûlages du chaume dans les Etats agricoles voisins, contribuant de manière significative à la pollution de Delhi, se poursuivent sans relâche. La Cour suprême, mardi a déploré "le véritable meurtre de nos jeunes".
Pour le vendeur de légumes Imtiaz Qureshi, désemparé, à l'hôpital, ce ne sont que des mots.
"Nous devons vivre jour après jour dans cet air", rappelle cet homme de 40 ans, qui passe son temps dans les rues. "Si je sors, l'air me tuera, si je ne le fais pas, la pauvreté me tuera."
O.Mehta--DT