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Élisabeth Borne a surmonté sans surprise lundi deux nouvelles motions de censure à l'Assemblée, obtenant l'adoption en première lecture du volet "recettes" du budget de la Sécurité sociale, avant un nouveau 49.3 imminent pour faire passer sans vote sa partie "dépenses".
Les motions de la gauche (LFI, communistes et écologistes) et du RN n'ont obtenu respectivement que 223 et 88 voix sur 289 requises pour faire tomber le gouvernement. Elles ripostaient au recours à l'article 49.3 de la Constitution pour faire passer sans vote la première partie de ce budget (PLFSS).
"J'agis dans l'intérêt du pays et je prends mes responsabilités", a-t-elle lancé, défendant un PLFSS qui prévoit "une nouvelle hausse des moyens" tout en "garantissant la soutenabilité financière de notre modèle".
- "Vous êtes des pinces" -
L'Assemblée "ne veut pas de votre budget", lui avait lancé le député LFI Hadrien Clouet. "Que ce soit par désintérêt, par manque de sérieux ou parce que vous êtes des pinces dès qu'il s'agit de protection sociale, vous devez partir".
L'élu RN Pierre Meurin avait pour sa part dénoncé "une tiers-mondisation médicale" du pays.
Les Républicains (LR) excluant de faire tomber le gouvernement sur un budget, leurs motions n'avaient pas plus de chances d'aboutir que celles repoussées il y a près de dix jours. Leurs rejets avaient alors valu adoption des "recettes" du budget de l'État (PLF) en première lecture.
Pour le député LR Yannick Neuder, la censure du gouvernement "aboutirait à remplacer Mme Borne par une Mme Borne bis", une "mascarade" selon lui. "Ou bien d'ouvrir les portes de Matignon à Jean-Luc Mélenchon", "ce que nous combattrons de toutes nos forces", a-t-il expliqué.
Une fois les motions écartées, les députés ont démarré dans la foulée l'examen de la partie "dépenses" du PLFSS, jugées insuffisantes pour le système de santé par l'ensemble des oppositions.
Mais les députés s'attendent à être interrompus rapidement. Et des sources ministérielles ont confirmé à l'AFP que le gouvernement envisageait de recourir à nouveau dès lundi au 49.3.
Il s'agirait du quinzième pour Élisabeth Borne et du troisième sur les budgets de 2024 en première lecture. Et il l'exposerait à de nouvelles motions de censure, dont le rejet permettrait à l'ensemble du PLFSS de poursuivre sa route au Sénat.
- Suspense sur les franchises -
Le volet "dépenses" comprend des mesures d'économies controversées, comme la possibilité de suspendre les indemnités journalières d'un assuré quand un médecin mandaté par son employeur juge son arrêt de travail injustifié. Ou la diminution du remboursement d'un assuré refusant un transport sanitaire partagé.
Une autre mesure de "responsabilisation" a cristallisé une partie des débats sans même figurer dans ce PLFSS: le doublement possible du reste à charge des assurés pour les médicaments (actuellement 50 centimes par boîte) et les consultations (1 euro).
Interpellé à gauche comme à droite, le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave a confirmé la semaine passée que cette hausse était "envisagée".
Mais il n'a pas assuré pour autant qu'elle serait mise en œuvre, rappelant que d'autres pistes d'économies existaient. Et qu'une hausse des franchises ne relevait pas du PLFSS, mais du "domaine réglementaire".
Une incertitude reste aussi de mise pour une autre mesure explosive: la possible mise à contribution de l'Agirc-Arrco, la caisse de retraites complémentaires du privé.
- Préservatifs gratuits -
Le gouvernement a certes renoncé "à ce stade" à ponctionner ce régime géré par les syndicats et le patronat. Mais sans exclure d'y revenir lors de la suite des débats budgétaires.
"Je préfère laisser les partenaires sociaux trouver des solutions, plutôt que de contraindre les ressources de l'Agirc-Arrco", a assuré lundi Mme Borne.
Selon une source ministérielle, l'exécutif souhaite que le régime complémentaire accepte de contribuer à hauteur de 400 millions d'euros en 2024 aux revalorisations des petites pensions.
La partie "dépenses" du PLFSS prévoit aussi des mesures consensuelles, comme le remboursement des protections périodiques réutilisables pour les femmes de moins de 26 ans, ou la gratuité des préservatifs, également pour les moins de 26 ans.
L'usage du 49 alinéa 3 permet au gouvernement d'intégrer les amendements de son choix, dans le texte sur lequel il engage sa responsabilité. Il a prévu par exemple d'ajouter l'octroi d'un "statut temporaire" de cinq ans au cannabis thérapeutique, dans l'attente d'une décision d'autorisation des autorités européennes.
I.Khan--DT