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Les salariés dénoncent "un gâchis", Nestlé jure avoir étudié toutes les options: un an après l'affaire des pizzas contaminées, le groupe a annoncé jeudi la fermeture définitive de son usine Buitoni de Caudry (Nord), au coeur de ce scandale sanitaire.
"Aucun licenciement ne sera notifié avant le 31 décembre 2023", a précisé dans un communiqué à l'AFP le géant suisse, qui s'engage à proposer aux 140 employés (hors intérimaires), "une opportunité de reclassement interne".
Nestlé, qui justifie cette fermeture par une chute des ventes, lance en parallèle "un processus de recherche de solution de reprise", sa "priorité des prochains mois".
Réunis devant l'usine, dont l'activité était suspendue depuis un mois, les salariés ont attendu, sous une pluie battante, des nouvelles de la réunion sur leur avenir, prévue de longue date entre la direction et les syndicats.
Les informations ont filtré peu à peu, avant le couperet: fermeture immédiate et maintien des salaires jusqu'en décembre. "On perd plus qu'un emploi: une deuxième famille", soupire Christophe Dumez, depuis 30 ans chez Buitoni comme aide cuisinier.
"C'est un immense gâchis", poursuit-il. "Je vais me réorienter, mais j'ai 50 ans. En usine, on est déjà des seniors, ça va être très dur."
- "On n'est pas responsables" -
"Aujourd’hui, on se retrouve avec plus rien à cause d’une bactérie qui a malheureusement fait deux décès", regrette Didier Fontaine, magasinier cariste depuis 10 ans. "On veut que Nestlé prenne sa responsabilité et dise à la France entière que nous, en tant que salariés, nous ne sommes pas responsables".
Le site produisait les pizzas surgelées Fraîch'Up, qui pourraient avoir provoqué la mort de deux enfants et l'intoxication de dizaines d'autres par la bactérie Escherichia coli.
Une information judiciaire est ouverte à Paris pour homicide involontaire concernant deux victimes et blessures involontaires pour 14 autres, selon une source judiciaire.
Nestlé avance "une contamination de la farine" comme explication "la plus probable" de la présence de la bactérie sur ses pizzas.
Mais selon la préfecture, des inspections sanitaires ont mis en évidence "la présence de rongeurs" et le "manque d'entretien et de nettoyage des zones de fabrication".
"S'ils ont changé des choses qui ont facilité la contamination, c'est eux (Nestlé). On n'est pas responsables", réplique Stéphane Derammelaere, délégué Force ouvrière.
Devant l'usine, certains pleurent, d'autres alimentent des feux de palettes, pendant que les délégués syndicaux confirment la mauvaise nouvelle. Des pétards éclatent quand la direction sort de l'établissement.
Les salariés, parmi lesquels de nombreux quinquagénaires, s'étaient réunis au petit matin pour recouvrir les grilles de l'usine de croix noires avec leur nom, date d'embauche et celle du 30 mars 2023 comme fin symbolique.
- "Obligation de résultat" -
"Nestlé s'est engagé à trouver un repreneur: je considère qu'il y a une obligation de résultat", a réagi auprès de l'AFP le ministre délégué à l'industrie Roland Lescure. Il doit rencontrer élus et syndicalistes lors d'un déplacement vendredi à Cambrai.
Le ministre relève également le contribution de 3 millions d'euros annoncée par le groupe pour l'emploi sur le territoire du Cambraisis --déjà touché par la fermeture de la sucrerie Tereos-- doublant l'apport de l'Etat.
Le patron des sénateurs socialistes Patrick Kanner a dénoncé sur Twitter une décision "scandaleuse", tandis que le président des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, a promis que la Région "resterait mobilisée aux côtés ses salariés".
L'affaire remonte à février 2022, quand Santé publique France (SPF) et la Direction de la répression des fraudes (DGCCRF) sont alertées d'une recrudescence de cas d'insuffisance rénale chez des enfants, liés à une contamination par E. coli.
Le 18 mars, Nestlé rappelle ses pizzas et interrompt la production. La préfecture interdit dans la foulée toute activité, les autorités sanitaires ayant établi un lien entre la consommation des pizzas et plusieurs cas graves de contamination.
L'usine avait rouvert partiellement mi-décembre, avant la suspension de mars.
A.Hussain--DT