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"Non à la fermeture": les employés de Tereos à Escaudoeuvres et de Buitoni à Caudry ont manifesté lundi leur colère face à la fermeture, actée ou annoncée, de leurs usines qui emploient plus de 300 personnes dans le Cambrésis, à laquelle s'oppose le ministre de l'Industrie.
Dans la matinée, jusqu'à un demi-millier de personnes, salariés, élus et habitants, se sont rassemblés devant l'usine de Caudry, où ont été produites les pizzas surgelées suspectées d'avoir provoqué la mort de deux enfants et l'intoxication de dizaines d'autres par la bactérie Escherichia coli.
Certains étaient en tenue de travail --casque, blouse blanche et gants en plastique-- d'autres ont craqué des fumigènes ou brandit des pancartes de fortune sur de large draps blancs: "Entre mensonges et trahison, sauvons nos emplois" ou encore "Nestlé doit assumer".
Près de 200 personnes sont employées dans cette usine, dont Nestlé vient de suspendre l'activité, à cause d'une chute des ventes. Une réunion le 30 mars pourrait définitivement sceller son sort.
"Il y en a beaucoup qui y croient encore, mais pour moi, c'est fini", estime parmi les manifestants Jérémy Denimal, 28 ans, salarié depuis 7 ans. "Je suis là surtout pour manifester pour mes collègues qui ont entre 40 et 55 ans. Pour eux, ça va être dur de retrouver du boulot".
- "Honte" -
L'une des ces anciennes, Emilie Ribeiro, 35 ans chez Buitoni, confie désormais sa "honte de travailler pour eux". "Avec eux, c'est l'argent (qui compte). Ils n'ont pas d'empathie pour les familles (des victimes des pizzas contaminées, ndlr), ni pour nous", regrette-t-elle.
"Les salariés ne doivent en aucun cas être les victimes collatérales d'un drame dont ils ne sont pas responsables", lance sur place le ministre de l'Industrie, Roland Lescure, salué par des applaudissements.
Après s'être entretenu avec la direction, il affirme lui avoir "donné 15 jours" pour "revenir avec des solutions concrètes". "Je souhaite qu'on produise à Caudry. Des pizzas ou autre chose", insiste-t-il.
Derrière L'Oréal, Buitoni est le deuxième plus gros pourvoyeur d'emplois de la ville. Son maire, Frédéric Bricout, a lancé une suggestion: que les usines du groupe fermées en Ukraine --"Smarties, KitKat"-- y soient relocalisées.
- "Pas normal" -
Même colère à Escaudoeuvres, à une quinzaine de kilomètres de là, où les salariés du géant sucrier Tereos bloquent leur usine jour et nuit depuis mercredi, pour protester contre sa fermeture. Une délégation doit rencontrer à la mairie dans l'après-midi M. Lescure.
Dans l'attente, une trentaine de salariés nourrissent des feux de bois et matériaux divers, enveloppant le site dans un grand panache de fumée noire.
"On espère, on va se battre jusqu'au bout", affirme David Le Clainche, délégué CGT.
Environ 400 élus, salariés et riverains se sont rassemblés dimanche devant la sucrerie. "C'est incompréhensible, (de fermer) une usine aussi rentable que la nôtre", a regretté Loïc Lagouche, secrétaire adjoint CGT au CSE. "Tereos ne réfléchit qu'à court terme."
Le site du groupe, propriétaire de Béghin Say, devait bientôt fêter ses 150 ans dans cette commune de 3.300 habitants de la périphérie de Cambrai. La direction a annoncé mercredi sa fermeture d'ici la mi-juin, et la suppression de 123 postes.
Selon le sucrier, ce choix est essentiellement dicté par une "réduction durable" de la production de betteraves en 2023-24, avec, dans le secteur d'Escaudoeuvres, une baisse des surfaces ensemencées supérieure à 10%.
La Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB) pointe "l'interdiction des néonicotinoïdes" comme principale explication à cette baisse.
"Une entreprise qui gagne de l'argent et qui ferme une usine, je pense que ce n'est pas normal", a réagi M. Lescure dans la matinée sur l'antenne de Sud Radio.
"Pour l'instant, la production de betteraves elle n'a pas baissé. Pour l'instant, le fameux puceron, il n'a pas frappé", a pointé le ministre.
Y.Chaudhry--DT