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Le président américain Joe Biden se rend mercredi à Détroit pour saluer le retour du grand salon de l'automobile, avec à son crédit l'adoption récente de mesures a priori favorables aux véhicules électriques mais dont l'une pourrait, selon des acteurs du secteur, ralentir leur adoption.
En poussant cet été pour un programme massif d'investissement dans les semi-conducteurs et un grand plan de réformes environnementales et sociales incluant la poursuite d'aides financières à l'achat de véhicules sans émissions, Joe Biden a décroché des victoires importantes à l'approche des élections législatives de novembre.
Le secteur automobile craint toutefois un retour de bâton avec les subventions nouvelle formule, qui peuvent monter jusqu'à 7.500 dollars: elles sont soumises à plusieurs conditions visant à garantir que les véhicules soient assemblés en Amérique du Nord et que les batteries soient fabriquées avec des matières premières provenant de plus en plus de la région.
L'idée est de réduire la dépendance des constructeurs à la Chine et à une chaîne d'approvisionnement pouvant être à tout moment perturbée, comme au plus fort de la pandémie.
Mais les constructeurs ne sont pas forcément prêts à offrir des véhicules pouvant prétendre à l'intégralité de l'aide financière.
"On va voir un ralentissement du taux de croissance", prédit John Eichberger, directeur exécutif du Fuels Institute, un groupe de recherche financé par des entreprises des secteurs de l'énergie et du transport.
- "Occasion manquée" -
Amateur d'automobiles, Joe Biden a déjà visité des usines de Ford et de General Motors depuis son arrivée à la Maison Blanche.
Il avait inclus 7,5 milliards de dollars d'aides à la construction de stations de recharge électriques dans un grand plan d'investissement adopté fin 2021.
En août, le président a poussé les parlementaires à voter pour une loi prévoyant 52 milliards de dollars pour relancer la production de semi-conducteurs aux Etats-Unis, des composants dont manquent cruellement les constructeurs automobiles depuis début 2021.
Puis il a promu la "loi sur la réduction de l'inflation", qui comprend les nouvelles aides à l'achat de véhicules électriques.
Sa visite à Détroit est censée apporter un coup de projecteur bienvenu à un salon de l'automobile passé à la trappe durant deux années à cause de la pandémie de Covid-19.
Depuis la dernière édition en 2019, les trois grands constructeurs basés à Détroit ont annoncé des dizaines de milliards de dollars d'investissements dans l'électrique pour tenter de rattraper Tesla, encore largement dominant sur ce segment.
Ford commercialise depuis le printemps une version non polluante de son populaire pick-up, le F150.
General Motors a encore dévoilé jeudi dernier un SUV électrique avec un prix de base à 30.000 dollars, censé attirer une clientèle plus modeste. Le même jour, Stellantis (ex Fiat-Chrysler) a annoncé qu'il lancerait quatre SUV de la marque Jeep en Amérique du Nord et en Europe d'ici 2025.
Les ventes de véhicules électriques aux Etats-Unis, pendant longtemps à la traîne de l'Europe sur ce segment, ont bondi de 66% au deuxième trimestre selon le cabinet Cox Automotive. Elles représentent désormais 5,6% des ventes de véhicules.
Les fabricants font pourtant face à plusieurs embûches, dont le manque de lithium et autres matériaux nécessaires à la conception des batteries, et des prix toujours plus élevés que les véhicules traditionnels.
Les aides du gouvernement pourraient donc apparaître comme une aubaine.
"Malheureusement, les exigences liées au crédit d'impôt pour les véhicules électriques rendront la plupart des véhicules immédiatement inéligibles à l'incitation", regrette John Bozzella, président de l'Alliance pour l'innovation automobile.
"C'est une occasion manquée à un moment crucial (pour le secteur) et un changement qui va surprendre et décevoir les clients à la recherche d'un nouveau véhicule", ajoute-t-il.
Les fabricants comprennent bien l'intérêt de se fournir le plus possible en matières premières localement, remarque Alan Amici, directeur du Centre pour la recherche automobile.
Mais reconfigurer les chaînes d'approvisionnement prend du temps et "le secteur doit encore trouver des solutions", dit-il.
Les constructeurs espèrent encore, selon lui, que Washington montrera une certaine flexibilité dans la mise en oeuvre de la loi.
Si les textes sont suivis scrupuleusement, seulement trois à cinq modèles pourraient, certaines années, être éligibles à l'aide de 7.500 dollars, avance John Eichberger.
Alors même que la transition vers l'électrique débute à peine, "c'est un obstacle supplémentaire sur une route déjà bien tortueuse", dit-il.
H.Sasidharan--DT