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Des scientifiques appellent à exclure l'absorption de CO2 qui se fait par le milieu naturel, notamment grâce aux forêts, dans la comptabilisation par les pays de leurs objectifs climatiques, sans quoi des règles "vagues" risqueraient de voir la planète se réchauffer plus qu'anticipé.
Les chercheurs, qui ont développé les connaissances derrière la notion de neutralité carbone, ont livré cet avertissement dans une étude publiée lundi dans la revue Nature, alors que la COP29 sur le climat entre dans sa deuxième semaine à Bakou (Azerbaïdjan) et que les pays doivent communiquer leurs nouveaux plans pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d'ici février 2025.
Océans, forêts et sols absorbent le CO2 qui réchauffe la planète. Ces "puits de carbone naturels" absorbent actuellement environ la moitié du carbone émis par l'humanité.
L'objectif le plus ambitieux de l'accord de Paris de 2015 vise à limiter à 1,5°C le réchauffement par rapport à l'ère préindustrielle.
S'ils n'ont pas spécifié comment atteindre cet objectif, les scientifiques soulignent que le monde doit diminuer de près de moitié ses émissions cette décennie et atteindre la neutralité carbone - que l'humanité n'émette pas plus de gaz à effets de serre qu'il n'en est absorbé - d'ici 2050.
Une fois cette neutralité atteinte, forêts et océans devraient être capables d'absorber le CO2 qui s'est accumulé dans l’atmosphère, permettant aux températures de se "stabiliser", explique Myles Allen, de l'université d'Oxford et principal auteur de cette étude, et qui a participé à développer les connaissance derrière le "net zero" dans les années 2000.
- "Neutralité carbone géologique" -
Mais depuis, un problème, qui ne lui était "pas venu à l'esprit à l'époque" a émergé, a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse.
En annonçant leurs objectifs climatiques, certains pays ont affirmé que la quantité de carbone absorbé naturellement par leurs forêts et la terre compenseraient une partie des émissions.
Sauf qu'on ne peut pas compter que les puits de carbone naturels fassent "deux boulots en un", a-t-il souligné: "si on compte sur eux pour éponger nos émissions anciennes, on ne peut pas dans le même temps les utiliser pour compenser les émissions futures".
Cela pourrait être vu comme une petite modification dans le comptage des gaz à effet de serre, mais en réalité cela pourrait signifier que le monde pense qu'il est sur la voie de limiter le réchauffement à 1,5°C alors qu'en fait il pourrait dépasser 2°C "et avoir un réchauffement qui se poursuit dans le futur", a-t-il déclaré.
La Russie, par exemple, "a apparemment souligné qu'elle pourrait atteindre la neutralité carbone tout en continuant à recourir aux énergies fossiles parce qu'ils ont de si grandes forêts", a déclaré M. Allen.
L'Union européenne a récemment commencé à revendiquer en partie le travail de ses forêts comme une compensation de ses émissions, selon Glen Peters, directeur au Centre de recherche international sur le climat d'Oslo.
Ce n'est pas que les pays enfreignent les règles, selon Myles Allen, "c'est juste que les règles sont un peu vagues".
Les chercheurs appellent à se concentrer sur la "neutralité carbone géologique", qui signifierait que pour chaque tonne de CO2 émise par les énergies fossiles, la principale source d'émissions, il faut qu'une tonne soit retirée de l'atmosphère et stockée de manière permanente dans le sol.
Si l'espoir d'un boom technologique de l'extraction du CO2 de l'air existe - seul 0,1% des émissions de CO2 est actuellement capturé et stocké, une proportion qui doit passer à 100% d'ici au milieu du siècle, selon Myles Allen.
"Si vous ne retirez pas les carburants fossiles du sol en premier lieu, alors vous êtes loin de résoudre le problème", a renchéri Glen Peters.
La semaine dernière, le Global Carbon Budget a anticipé que l'humanité battrait encore son record pour les émissions de CO2 en 2024, année qui s'annonce comme la plus chaude jamais enregistrée.
J.Chacko--DT