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Dans les Andes péruviennes, un fonds de l'ONU destiné aux petits producteurs vulnérables aux chocs climatiques a permis à un groupe de femmes apicultrices de créer une pépinière forestière pour sauver leurs ruches en péril.
Dans cette région de Cajamarca (nord-est), les glaciers reculent, les précipitations sont plus intenses, bien que moins fréquentes, et l'eau provenant de sources naturelles diminue, autant de phénomènes associés au réchauffement climatique, selon une étude de l'université locale.
Pluies, gelées et sécheresses affectent la floraison et la disponibilité du nectar et du pollen pour les abeilles, en plus de la perte de leur habitat due à la déforestation.
Pour sauver leur entreprise et lancer une petite pépinière forestière, les apicultrices du hameau de Chilal de la Merced, perché à plus de 2.600 mètres d'altitude, ont bénéficié du programme Avanzar Rural, destiné aux petits producteurs des régions isolées développé par le Fonds international de développement agricole (Fida) des Nations unies.
Voyant leur petit commerce au bord du gouffre, il leur "est venu l'idée d'acheter des fleurs et des plantes indigènes" plus résistantes aux changements climatiques soudains "pour les planter" dans un verger bio avant de les transplanter dans la forêt, raconte Karina Villalobos.
"Nous nous sommes inspirées des abeilles. Nous nous sommes organisées comme une ruche", explique-t-elle.
Avec les 14 autres apicultrices du hameau, la jeune femme de 28 ans a créé en 2021 l'association Hojuelas de Miel pour recevoir une subvention de 27.000 dollars. En contrepartie, Hojuelas de Miel a dû réunir quelque 3.800 dollars (10% du plan total) pour commencer à acheter du matériel, engager des conseillers techniques, environnementaux et financiers.
Ces femmes sont "en première ligne du changement climatique", souligne Juan Diego Ruiz, directeur du Fida pour la région.
C'était la première fois qu'elles entendaient parler de financement climatique, sujet qui devrait enflammer les négociations entre les pays riches et les autres à la COP29, la conférence climatique de l'ONU qui se tiendra en novembre en Azerbaïdjan.
En 2023, le Fida a affecté 1 milliard de dollars à l'Amérique latine, dont 60% ont été investis dans l'"action climatique" pour aider les populations rurales à "limiter les impacts et réduire la vulnérabilité" aux événements extrêmes, précise M. Ruiz.
Sur "l'ensemble des flux financiers internationaux liés au climat, on estime que moins de 2% sont directement consacrés au travail avec les communautés rurales, les communautés paysannes et les populations indigènes", détaille-t-il.
- "Coordonner" -
"La réussite a été de coordonner les appels à propositions avec les gouvernements locaux dans des zones très reculées", signale Susy Bengolea, coordinatrice d'Avanzar Rural.
Au cours des quatre dernières années, ce programme a financé 1.031 petites structures bénéficiant à 17.557 personnes, grâce aux contributions du Fida (24 millions de dollars) et de l'État péruvien (45 millions de dollars).
Le défi était d'autant plus grand que les femmes en milieu rural sont le segment de la population qui a le moins accès au système financier au Pérou, une exclusion aggravée par l'importance de l'économie informelle.
Quelque 3,5 millions de femmes vivent dans les campagnes péruviennes, 41% d'entre elles ne génèrent pas de revenus propres et seulement 16% disposent d'une carte de débit, selon les statistiques officielles.
Traditionnellement, la production de miel est réservée aux hommes. Nous n'avions pas "de document disant que ceci nous appartient, parce que c'est l'homme qui est le propriétaire de la terre", indique Karina Villalobos, en exposant les premières difficultés rencontrées pour créer l'association avant de prétendre au prêt.
Sans ce coup de pouce d'Anvanzar Rural, Hojuelas de Miel n'existerait pas. Les apicultrices exploitent aujourd'hui 89 ruches et réalisent environ 13.000 dollars de chiffre d'affaires annuel.
"Ces femmes ont compris que le changement climatique était là pour durer, mais je suis sûre que dans cinq ou dix ans" Hojuelas de Miel existera encore, estime Susy Bengolea.
"Aujourd'hui, nous sommes des femmes autonomes et résilientes", se félicite Karina Villalobos, en soulignant qu'avec les fonds non-utilisés, Hojuelas de Miel avait fondé une banque communautaire.
"Nous nous prêtons mutuellement (...) Nous avons donc grandi, mais nous voulons maintenant que notre petite banque soit bientôt en mesure de servir la communauté", dit-elle pleine d'espoir.
D.Al-Nuaimi--DT