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Quand un torrent de déchets en décomposition venant de la principale décharge de la capitale ougandaise Kampala a dévalé sur sa maison, Esther Nalukwago a fui, "à moitié nue", pour échapper à la catastrophe, qui a fait au moins 23 morts.
Cette ferrailleuse de 42 ans remercie le ciel de s'être trouvée seule chez elle samedi matin. Ses deux jumelles de 12 ans étaient à l'école.
"J'ai vu une partie de ma chambre s'effondrer. Je me suis précipitée dehors à moitié nue", raconte-t-elle à l'AFP lundi, devant les restes de sa maison du quartier de Kiteezi, dans le nord de Kampala.
"Une fois sortie de chez moi, tremblante de peur et de panique, (j'ai vu que) les maisons environnantes avaient été recouvertes par un déluge de matière noire et peu après, les gens se sont mis à hurler", poursuit-elle, imperturbable face à la puanteur ambiante.
Lundi matin, des secouristes en tenue de protection légère continuaient de fouiller, sous le froid crachin, l'amas putride, à la recherche d'éventuels survivants.
Un dernier bilan lundi a fait état de 23 morts, engloutis dans cette avalanche de déchets provoquée par de fortes pluies. Selon les autorités, au moins cinq enfants figurent parmi les victimes.
Parmi les personnes tuées, l'épouse et un des enfants, âgé de 7 ans, d'Isma Mwogezi. "Ce qui s'est passé samedi est quelque chose qui ne s'effacera pas de ma mémoire", se désole cet homme de 61 ans, qui vit à Kiteezi depuis près de 40 ans.
Le président Yoweri Museveni a promis cinq millions de shillings ougandais (environ 1.200 euros) pour chaque personne tuée et un million de shillings (246 euros) pour chaque blessé.
Mais Isma Mwogezi n'en a que faire. "Aucune somme d'argent ne peut compenser une vie perdue", lâche-t-il.
- Odeur, eau contaminée, maladies -
Isma Mwogezi est en colère contre les autorités. "Pourquoi attendre et indemniser les gens au lieu d'empêcher que des morts se produisent?", accuse-t-il, debout près de l'endroit où se trouvait sa maison.
"Le gouvernement devrait reconnaître son erreur", estime également l'un des responsables du quartier, Abubaker Semuwemba Lwanyaga.
Le drame a ravivé la polémique sur cette décharge de 14 hectares créée en 1996 dans le quartier de Kiteezi, qui reçoit la quasi-totalité des déchets de la capitale, soit environ 1.500 tonnes par jour.
Depuis sa création, les habitants alertent les autorités sur les effets d'une telle installation, explique à l'AFP Abubaker Semuwemba Lwanyaga.
"Nous nous sommes plaints de la puanteur des ordures en décomposition, nos sources d'eau étaient contaminées, les gens tombaient malades à cause de la saleté et de la pollution", détaille-t-il.
"Le gouvernement aurait dû reloger les gens s'ils voulaient installer une décharge et les indemniser, au lieu d'attendre qu'une catastrophe se produise", juge-t-il.
En janvier, le maire de Kampala, Erias Lukwago, avait déjà prévenu que les personnes travaillant et vivant à proximité de la décharge étaient exposées à de nombreux risques sanitaires en raison du débordement des déchets.
Il avait déclaré que le site n'était pas entretenu, qualifiant la situation de "crise nationale" nécessitant l'intervention du gouvernement central et du parlement.
Lundi, l'édile se montrait pessimiste sur les recherches: "Nous ne nous attendons plus à trouver de survivants".
I.El-Hammady--DT