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Politicien chevronné dans un royaume où la démocratie parlementaire est encore jeune, Tshering Tobgay, qui s'apprête à redevenir le Premier ministre du Bhoutan, devra affronter des vents contraires: des difficultés économiques et un exil massif des jeunes.
Après avoir vu son parti remporter près de deux tiers des sièges lors des élections législatives de mardi, M. Tobgay, va retrouver un poste de Premier ministre qu'il a déjà occupé entre 2013 et 2018.
Défenseur de l'environnement et sportif passionné, cet ancien fonctionnaire de 58 ans, diplômé de l'université de Pittsburgh et de Harvard, était le chef de l'opposition au sein du premier parlement du Bhoutan lors de sa création en 2008.
Aujourd'hui chef du Parti démocratique populaire (PDP) libéral, M. Tobgay s'est entouré d'une équipe expérimentée comprenant plusieurs anciens ministres et législateurs, avec laquelle il a remporté 30 des 47 sièges lors des élections de mardi, selon les résultats provisoires diffusés par les médias bhoutanais.
Arborant habituellement la traditionnelle tenue colorée "gho" de la nation himalayenne, une robe rayée qui descend jusqu'aux genoux, il est un ardent défenseur de la politique du "bonheur national brut" inscrite dans la Constitution du pays.
Cette politique, lancée par le précédent roi du Bhoutan dans les années 1970, repose sur quatre piliers : la gouvernance, le développement socio-économique, la préservation de la culture et la protection de l'environnement.
M. Tobgay a qualifié cette politique de "vision pionnière qui vise à améliorer le bonheur et le bien-être" des citoyens, lors d'une conférence TED.
Il a fait valoir que même si la croissance économique est importante, elle "ne doit pas découler d'une atteinte à notre culture unique ou à notre environnement préservé".
Il a toutefois reconnu qu'il s'agit d'une politique "plus facile à énoncer qu'à appliquer, surtout quand on est l'une des plus petites économies du monde".
- "Pays sous-développé" -
Pour le Bhoutan, un pays d'environ 800.000 habitants pris en étau entre les deux nations les plus peuplées du monde, l'Inde et la Chine, les défis sont nombreux.
Le pays est en proie à la pauvreté rurale, à un chômage élevé des jeunes et à une fuite des cerveaux vers l'étranger.
"Nous devons renforcer notre économie non seulement pour conserver nos précieuses ressources humaines dans le pays, mais aussi pour inciter ceux qui ont émigré à l'étranger à revenir et à participer activement à l'édification de la nation", a affirmé M. Tobgay dans son programme.
Il a aussi promis de renforcer les liens du Bhoutan avec l'Inde, notamment en développant les liaisons ferroviaires avec ce géant voisin du sud.
Plus des deux tiers du pays sont recouverts de forêts et le Bhoutan se vante de faire partie d'une poignée de pays à bilan carbone négatif, une source de fierté pour M. Tobgay.
Défenseur des politiques de préservation de l'environnement et des efforts visant à protéger la biodiversité, M. Tobgay a mis en garde contre les dangers causés par la fonte rapide des glaciers himalayens liée au réchauffement climatique.
Il est également lucide sur les problèmes auxquels son pays est confronté.
"Le Bhoutan est un petit pays de l'Himalaya, on nous appelle Shangri-La... mais laissez-moi vous dire d'emblée que ce n'est pas le cas", a-t-il déclaré lors d'une conférence TED en 2016. Shangri-La désigne un lieu imaginaire paradisiaque de l'Himalaya, dans le roman "Horizon perdu" de l'écrivain américain James Hilton publié en 1933.
"Mon pays n'est pas un grand monastère peuplé de moines heureux... la réalité est que nous sommes un petit pays sous-développé qui fait de son mieux pour survivre."
Marié et père de deux enfants, Tshering Tobgay est un sportif passionné (tir à l'arc, le sport national, cyclisme), adepte du yoga et de la randonnée dans les montagnes de son pays.
A.Krishnakumar--DT