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Touché au printemps par la grippe aviaire, l'éleveur de canards Damien Dubos en est certain: "Si le vaccin n'arrivait pas, c'était fini" pour son exploitation du Gers qui était lundi une des premières à procéder à une immunisation vécue comme "un soulagement".
Sur cet élevage qu'il gère avec ses deux frères, M. Dubos s'occupe actuellement "de 10.790 canards" mais, alors qu'il accueille le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau, venu y lancer la campagne nationale de vaccination des palmipèdes, impossible d'apercevoir le bout d'un bec ou le reflet d'un plumage.
Un périmètre de sécurité est installé à quelques mètres du hangar où les oisillons sont vaccinés et seuls le ministre et l'agriculteur, vêtus de combinaisons et de charlottes adaptées ainsi que de surchaussures plastifiées, pourront observer les débuts de l'opération sécurisée.
"Comment ça marche? C'est simple, vous isolez un lot de canards, c'est une vaccination assez précise, c'est pour ça qu'on a besoin de vaccinateurs formés et de vétérinaires pour les encadrer, ensuite ça dure exactement une demi-seconde par canard", a expliqué M. Fesneau à la presse.
"C'est une vaccination en deux injections, une que l'on va faire à partir de dix jours d'âge et on devra faire un rappel 18 jours plus tard, l'objectif étant que les animaux soient immunisés au maximum à six semaines d'âge", a précisé à l'AFP Alice Machet, la vétérinaire qui supervisait la vaccination chez M. Dubos.
- Pertes en milliards d'euros -
La grippe aviaire a touché la France de 2015 à 2017 puis quasiment en continu depuis fin 2020.
Le pays a euthanasié des dizaines de millions de volailles ces dernières années (10 millions en 2022-2023 par exemple) et les pertes économiques se chiffrent en milliards d'euros.
Pour casser cette spirale, la France a décidé de rendre obligatoire la vaccination dans les élevages de plus de 250 canards (hors reproducteurs) à partir du 1er octobre, l’État prenant en charge 85% du coût de 100 millions d'euros de cette campagne vaccinale initiale.
Les palmipèdes - élevés pour le foie gras ou la viande - sont ciblés car très sensibles au virus. Ils le diffusent dans l'environnement avant même d'en présenter des symptômes, ce qui favorise la propagation.
Pour le ministre, le début de cette immunisation de masse (64 millions de canards à vacciner dans 2.700 élevages en 2023-2024, selon le ministère), "c'est un moment à la fois d'espoir et d'optimisme retrouvé même si tout n'est pas gagné".
"Il ne faut jamais être arrogant et trop sûr des choses, mais (...) on peut nourrir de bons espoirs que l'on ait une saison plus sereine", a-t-il affirmé.
"C'est un grand jour pour nous", a expliqué à l'AFP Bernard Malabirade, président de la chambre d'agriculture du Gers, l'un des principaux départements producteurs de foie gras qui compte environ 500 éleveurs. "Cela fait sept ans qu'on est pris dans la tourmente de cette crise d'influenza aviaire à répétitions dans un département qui a été malheureusement l'un des plus régulièrement touchés".
- "Bientôt le début de la fin" ? -
"On redémarre en redonnant un vrai espoir aux éleveurs mais aussi à tous les salariés des filières, les conserveurs, les transporteurs, etc. il faut imaginer dans quel état psychologique sont l'ensemble des gens qui travaillent dans ces filières canard", a-t-il dit.
"J'espère que c'est bientôt le début de la fin de cette terrible aventure", complète la directrice du comité interprofessionnel des Palmipèdes à foie gras (Cifog), Marie-Pierre Pé, tandis que le député socialiste du Gers David Taupiac salue certes le pas "important" de la vaccination mais insiste également sur la nécessité de la "dédensification" des élevages et de leur déconcentration géographique pour empêcher la propagation des épidémies.
Dans son exploitation, Damien Dubos veut croire à la lumière au bout du tunnel. "On a fait des investissements importants, pour l'instant, tout ce qu'on a fait n'a pas marché, on espère vraiment que ce vaccin va nous sauver et sauve la filière, tout simplement."
I.Mansoor--DT