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"Tournant" pour l'économie ou texte "vide"? Le projet de loi sur l'industrie verte, visant à stimuler une réindustrialisation décarbonée du pays, est examiné à partir de lundi après-midi en première lecture par l'Assemblée nationale, après sa large adoption au Sénat.
Les députés vont se saisir dans l'hémicycle du dernier gros morceau à leur programme avant la pause estivale. Un texte emblématique pour l'exécutif, qui a fait de la reconquête industrielle une bataille prioritaire après la crise des retraites.
Il "constitue un véritable tournant pour notre économie" après une "ère de désindustrialisation massive", a plaidé le ministre de l'Industrie, Roland Lescure, en commission.
Pour stimuler des projets comme ceux du "Big five" - éolien, photovoltaïque, pompe à chaleur, batteries, hydrogène décarboné - le gouvernement met notamment sur la table des délais raccourcis pour les autorisations d'implantation et de nouveaux outils pour attirer l'épargne privée.
Une partie des mesures se concentrent sur la mobilisation du foncier avec des "mesures radicales" selon l'exécutif, qui a promis de mettre à disposition de l'industrie 50 sites dépollués.
- "Epargne climat" pour les mineurs -
En simplifiant et en accélérant les procédures, le projet de loi fixe l'objectif de diviser par deux le délai moyen pour obtenir une autorisation d'ouverture d'usine, aujourd'hui estimé à 17 mois.
Pour quelques projets "d'intérêt national majeur", désignés par décret, une procédure d'exception est prévue, donnant la main à l'Etat.
Plutôt que sur l'argent public, l'exécutif met l'accent sur la mobilisation de l'épargne privée. Avec un nouveau produit pour les moins de 18 ans, le "plan épargne avenir climat", dont l'exécutif attend un milliard d'euros de collecte pour l'industrie verte.
En mobilisant aussi davantage les plans d'épargne retraite et l'assurance vie, il espère un total de 5 milliards d'épargne privée.
Un label serait par ailleurs créé pour donner à des entreprises vertueuses un accès privilégié à la commande publique.
Au Sénat à majorité de droite, le texte avait été remanié pour associer davantage les collectivités, en particulier sur les projets industriels "d'intérêt national majeur".
Inquiets de voir les procédures ralenties, le gouvernement et les députés du camp présidentiel ont rectifié le tir par des amendements en commission.
Le principe d'un "avis conforme" des collectivités en fin de procédure pour pouvoir modifier des documents d'urbanisme, introduit par les sénateurs, a ainsi été remplacé par un accord à donner en amont.
- "Trous dans la raquette" -
Les députés ont aussi supprimé en commission un article introduit par le Sénat qui excluait les projets estampillés "industrie verte" des limites contraignantes de terres artificialisables.
Le sort a été le même pour un article imposant à l'Etat d'élaborer une "stratégie nationale" pour l'industrie verte jusqu'à 2030, qui avait également été ajouté au Sénat.
Au grand regret des oppositions, des mesures fiscales et financières, comme la création d'un crédit d'impôt pour soutenir des projets "verts", ont été renvoyées à la prochaine loi de finances.
"Il y a des mesures qui vont plutôt dans le bon sens", estime la députée LR Virginie Duby-Muller, tout en déplorant des "trous dans la raquette".
La droite reproche notamment au projet de loi de trop se focaliser sur le "Big five". "Pourquoi ne pas élargir?", demande Mme Duby-Muller, qui aurait aussi souhaité que la question des importations soit traitée.
Au Rassemblement national, le député Alexandre Loubet raille une "montagne (qui) accouche d'une souris" et un "saupoudrage de mesurettes".
La gauche aussi, pointe un manque d'ambition. Le texte est "si vide", selon l'Insoumise Alma Dufour, qu'on ne peut même pas l'amender" avec des propositions des travailleurs des industries. Il traduit une "vision libérale" et "rabougrie", pour le communiste Sébastien Jumel.
L'objectif est d'"attirer les investissements étrangers en échange de cadeaux fiscaux voire de réduction de la vigilance environnementale", tacle le socialiste Gérard Leseul.
Selon l'écologiste Charles Fournier, ce texte ne mérite pas le qualificatif de "vert", car il ne pose pas la question de "nos besoins au regard des limites planétaires".
Pour boucler l'examen du projet de loi, lesté de près de 1.600 amendements, des jours de séance ont été ajoutés les samedi 22 et dimanche 23 juillet, repoussant la pause estivale des députés.
R.Mehmood--DT