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Dans les contreforts du Massif central, l'implantation d'une porcherie industrielle mobilise riverains, néoruraux, pêcheurs et défenseurs de l'environnement, inquiets de voir leur nature préservée transformée en "poubelle", leurs cours d'eau pollués, leur air pur altéré.
Cette exploitation d'une capacité de 1.000 porcs, affiliée à une coopérative, a reçu en fin d'année le feu vert de la préfecture pour s'installer à Giat (Puy-de-Dôme), le conseil municipal a donné son aval.
"C'est un jeune éleveur qui reprend l'exploitation de son père. Il y a déjà des porcheries sur la commune et son projet s'inscrit dans cette filière", explique Didier Sénégas-Rouvière, maire de la commune de 800 habitants.
L'élevage constitue l'activité principale de ce territoire marqué par l'exode rural avec des exploitations de taille modeste, bien loin des élevages industriels développés dans d'autres régions françaises, au coeur de vifs débats.
A Giat, l'activité agricole façonne un paysage bucolique, où alternent bocage, étangs et cours d'eau.
Aussi, pour les opposants, une porcherie de cette capacité, avec des animaux engraissés à l'intérieur des bâtiments est une vraie menace pour l'environnement et la qualité de vie. Principal point noir selon eux: l'épandage de lisier -déjections des porcs- qui permet de fertiliser les parcelles des agriculteurs.
"C'est un territoire avec des eaux de surface donc tout va se retrouver directement dans l'eau avec des conséquences sur la biodiversité", affirme Arnaud Chapal, un retraité qui mène la contestation.
Cet habitant de Basville (Creuse), à une poignée de kilomètres, a fondé une association pour déposer un recours devant le tribunal administratif.
Même inquiétude du côté de la Fédération de pêche: "il y a un risque de pollution du Sioulet, la seule rivière où il y a encore des truites sauvages" estime Michel Vigier, un responsable local.
Des associations comme L214 ou France Nature Environnement commencent aussi à se mobiliser.
-"Omerta"-
Dans son arrêté, la préfecture précise que le plan d'épandage présente un excès de phosphore -principal responsable de la pollution des cours d'eau- tout en accordant un délai de cinq ans à l'éleveur pour se mettre "en conformité".
"On ne va pas attendre cinq ans! La Creuse n'est pas une poubelle. C'est maintenant qu'il faut arrêter, car il y a tous les autres projets derrière" souligne Arnaud Chapal.
"Les industriels savent qu'ils ne peuvent plus aller en Bretagne alors ils viennent dans les territoires déshérités comme les nôtres", dit-il.
Faux, répond Christine Roguet, cheffe de projet à l'Ifip (Institut du porc): les éleveurs privilégient "les zones où la production est importante, car il y a déjà un réseau d'outils, de compétences".
"Pourquoi empêcher un jeune qui a un projet dans une zone de faible densité?", interroge-t-elle en assurant que "les progrès technologiques et l'encadrement des éleveurs" limitent désormais les risques environnementaux.
Pour elle, se pose surtout la question de l'autonomie alimentaire: pour la filière porcine, le taux d'auto-approvisionnement de la France est de 100% mais atteint 135% en Allemagne et 200% en Espagne. "Les gens préfèrent-ils manger du cochon espagnol?" questionne-t-elle.
Quant à l'épandage de lisier, "c'est un engrais naturel et ce sera toujours ça en moins d'engrais chimiques", selon elle.
Mais Xavier Dubois, 39 ans et sa compagne Diane Chastang, 35 ans, qui cultivent des légumes bio près de Basville, refusent de "choisir entre la peste et le choléra". Ils craignent le pire depuis qu'ils ont découvert que le lisier serait déversé sur des parcelles situées au-dessus de leurs terres.
"Nous ne sommes pas militants mais on s'interroge: quelles seront les conséquences, comment cela va être contrôlé?", demande Xavier Dubois, évoquant une "omerta" autour du dossier. De fait, aucun éleveur sollicité par l'AFP n'a souhaité s'exprimer.
A Fernoël, village proche de l'exploitation, "tout le monde est contre mais les gens ne veulent pas le dire. Personne ne bouge parce qu'ils sont cousins ou eux-mêmes agriculteurs", témoigne Marie-Claude Berger, une habitante qui redoute aussi "la pollution olfactive". "Ma voisine n'en dort plus, elle a peur de ne pas pouvoir vendre sa maison", souffle-t-elle.
Le maire de Giat lui, voit les opposants comme "une minorité de personnes qui ne vivent pas à l'année dans la région et défendent surtout leurs problèmes de résidence secondaire sous couvert d'écologie".
K.Al-Zaabi--DT