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Martin, 8 ans, et ses jeunes camarades équipés de casques et gilets fluorescents, slaloment entre les travaux d'une grande artère de Bordeaux: ces élèves de CM1/CM2 sortent pour la première fois en ville dans le cadre de l'opération "savoir rouler à vélo".
Lancé en 2019, ce programme interministériel a pour but de donner aux enfants "les bons réflexes" à vélo, explique le ministère des Sports, qui pilote le projet mis en place par des municipalités volontaires, dont celle de Bordeaux depuis la rentrée 2022.
Élisabeth Borne a annoncé le 20 septembre l'ambition d'étendre le "savoir rouler à vélo" (SRAV) à l'ensemble d'une classe d'âge. Ce point doit être abordé lors du prochain comité interministériel prévu cet automne.
Encadrés par deux éducateurs et un parent accompagnant, les élèves de CM1/CM2 de l'école Henri IV, par groupes de six, déambulent sur leurs vélos en répétant les comportements appris lors des séances précédentes, effectuées dans l'enceinte de l'école.
Douze élèves effectuent le parcours d'une vingtaine de minutes. "C'était incroyable parce que je ne suis jamais sorti sur la route", s'exclame Enzo, 9 ans, après une heure et demie de pratique.
Le circuit de moins de trois kilomètres emprunté par les apprentis cyclistes a été pensé par Kevin Valero, chargé du SRAV à la mairie de Bordeaux (un poste spécialement créé). Depuis le mois de juin, il a repéré "où sont les passages possibles, où sont les aménagements cyclables, où il est trop dangereux d'emmener les enfants", explique-t-il.
- Des objectifs ambitieux -
Environ 185.000 enfants ont déjà reçu leur attestation "savoir rouler à vélo" et l'objectif des 200.000 au 31 décembre devrait être atteint, assure le ministère des sports, qui vise 800.000 enfants formés "d'ici fin 2024", puis 800.000 par an en 2027.
Si, au ministère, on se satisfait que le SRAV soit devenu "le programme de référence" en matière d'"apprentissage du vélo pour les enfants", on reconnaît aussi des freins à sa démocratisation.
Parmi eux notamment, son coût. S'il ne revient qu'à 50 euros par enfant, selon le ministère, l'État n'apporte pas de financement direct.
À Bordeaux par exemple, la municipalité a déboursé 35.000 euros de matériel (vélos, plots, etc.), 1.800 euros pour former un agent municipal et 50.000 euros par an pour financer les postes liés au programme. La mairie économise en outre 30.000 euros grâce à un partenariat avec le Comité de cyclisme Gironde qui met à disposition deux de ses salariés à l'année.
Ces dépenses nouvelles correspondent à des "choix politiques qu'il faut faire", estime Mathieu Hazouard, adjoint au sport à la mairie de Bordeaux qui prône le développement de l'usage des mobilités douces.
- L'appréhension de la chaussée -
La dernière partie du programme, le "Bloc 3", qui consiste à emmener les élèves sur la chaussée pour les confronter aux conditions de circulation réelles, est par ailleurs compliquée dans les grandes villes comme à la campagne.
Camions de livraison sur les voies cyclables, automobilistes pressés: les CM1/CM2 de l'école Henri IV ont découvert sur leur parcours les problématiques rencontrées tous les jours par les cyclistes en zone urbaine.
Cette confrontation permet de sensibiliser les élèves mais peut générer des "appréhensions qui sont légitimes" pour le corps enseignant, explique Antoine Goubart, directeur de l'école, "rassuré dès le début" par l'encadrement proposé par les éducateurs présents.
La densité du trafic serait d'ailleurs le frein principal des parents pour laisser leurs enfants faire du vélo, d'après le rapport final AMPERE 2021 publié par l'Observatoire national de la sécurité routière.
Pour les associations de promotion du vélo, emmener les enfants sur la chaussée n'est qu'un premier pas. "C'est génial [...] mais c'est le tout début de leur apprentissage", explique Cyril Vernay, chargé de mission mobilité scolaire à la Maison du Vélo Lyon, qui appelle à impliquer davantage les parents dans l'éducation des enfants à la bicyclette.
Z.W.Varughese--DT