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En cette rentrée, quelque 180 collèges en France expérimentent la "pause numérique", soit l'interdiction totale des téléphones portables, avant une éventuelle généralisation en janvier 2025. En quoi consiste cette expérimentation? Comment peut-elle se déployer? Pour quel coût?
- Que dit la loi? -
Depuis 2018, une loi interdit "l'utilisation d'un téléphone mobile ou de tout autre équipement terminal de communications électroniques" dans "les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges". Dans les lycées, "le règlement intérieur peut interdire l'utilisation par un élève" dans "tout ou partie de l'enceinte de l'établissement".
Dans les collèges, la règle est que le téléphone doit être "éteint et rangé", détaille Jérôme Fournier, secrétaire national du SE-Unsa.
Pour Bruno Bobkiewicz, secrétaire général du SNPDEN-Unsa, premier syndicat des chefs d'établissement, "ça se passe globalement plutôt bien". "Le niveau d'usage des téléphones portables dans les collèges est aujourd'hui très bas", ajoute-t-il. En cas de problème, "on a moyen d'agir". "On confisque des téléphones, on convoque des parents, on punit des élèves".
- Pourquoi cette expérimentation? -
L'expérimentation est lancée à la suite des préconisations de la commission "écrans" voulue par Emmanuel Macron. Un rapport remis par des experts au chef de l'État estime qu'il faut interdire les téléphones portables avant 11 ans, en limitant strictement l'accès aux réseaux sociaux pour les adolescents de moins de 15 ans.
"L'objectif, c'est vraiment de permettre à nos élèves d'avoir pendant le temps scolaire au collège, à l'école également d'ailleurs, une meilleure concentration. C'est également leur donner ou redonner la possibilité d'avoir des liens avec leurs camarades pendant les temps qui ne sont pas des temps de classe", a dit mardi la ministre de l'Education nationale, Nicole Belloubet, lors d'un déplacement dans un collège de Massy (Essonne).
C'est aussi "évidemment de lutter contre le phénomène de harcèlement qui se déroule sur les réseaux sociaux pendant ce temps scolaire", a-t-elle ajouté.
Pour Jérôme Fournier, "l'objectif, en fait, est de répondre aux difficultés des collèges pour lesquelles la règle actuelle n'est pas suffisante", même si "dans l'immense majorité des collèges, elle fonctionne".
- En quoi consiste-t-elle? -
L'expérimentation va concerner plus de 50.000 collégiens. "Il appartient à chaque établissement de déterminer des modalités pratiques", avec la possibilité notamment de mettre en place "un système de casiers", détaille le ministère.
À leur entrée dans le collège, les élèves devront laisser leur téléphone dans des boîtes ou des casiers. Ils le récupèrent à l'issue des cours.
Cette interdiction "est valable pendant le temps scolaire et périscolaire. Elle est aussi effective durant toutes les activités scolaires organisées en dehors" de l'établissement.
- Quel coût? -
Une généralisation de ce dispositif, envisagée pour janvier 2025, serait "précipitée et coûteuse", avec une facture qui pourrait s'élever à "près de 130 millions d'euros" pour les 6.980 collèges de France, ont dénoncé les départements, chargés du bâti des collèges.
Mme Belloubet a estimé que "les choses se mettront en place progressivement". "Les coûts financiers me semblent assez modestes", a-t-elle ajouté, citant l'exemple du collège Claudine Hermann de Massy, où le dispositif consiste "en l'acquisition de mallettes portables (une mallette nécessaire par classe, NDLR) qui coûtent 60 euros l'unité".
Pour Départements de France, "la responsabilité en cas de vol dans ces casiers installés dans des collèges se pose" en outre "avec acuité".
- Des doutes et critiques -
Cette expérimentation suscite aussi le scepticisme de la communauté enseignante pour plusieurs raisons.
Pour le Snes-FSU, premier syndicat des collèges et lycées, cette mesure "manque de concertation" et "pose question". "Comment ça se passe à l'entrée dans l'établissement? Comment ça se passe dans la journée?", sachant "qu'il y a parfois des élèves qui ont deux téléphones portables", demande sa secrétaire générale, Sophie Vénétitay.
Pour le SE-Unsa aussi, "pour résoudre une difficulté, on va en créer une autre". "Il va falloir du personnel pour gérer l'arrivée, la dépose et le départ, la récupération des téléphones portables. Qui?", s'interroge Jérôme Fournier.
"Ça va être compliqué à mettre en œuvre", abonde Bruno Bobkiewicz. Si l'élève a un téléphone dans le fond de son sac, "je ne vais quand même pas fouiller le sac pour le lui prendre".
A.Krishnakumar--DT