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Pour éviter au gouvernement allemand de sombrer "au pire moment", Olaf Scholz réunit mercredi les ténors de sa coalition dans une tentative incertaine de surmonter les divisions sur le cap économique et budgétaire à donner à l'Allemagne.
Vert, ça passe, rouge ça casse : le sort de la coalition "feu tricolore" composée des sociaux-démocrates, des écologistes et des libéraux ne tient qu'à un fil et l'issue des pourparlers organisés toute la journée à la chancellerie est incertaine.
La guerre des nerfs pourrait aussi se poursuivre jusqu'à la semaine prochaine, lorsque le gouvernement devra boucler son projet de budget 2025.
Une prolongation donnerait au gouvernement le temps de méditer les premiers résultats de la présidentielle aux Etats-Unis et de se demander s'il est raisonnable de laisser le pays sans direction à un moment critique pour l'Europe.
"C'est le pire moment pour que le gouvernement échoue", a averti en début de semaine le vice-chancelier écologiste et ministre de l'Economie Robert Habeck, faisant allusion au conflit en Ukraine, à l'élection américaine et aux difficultés économiques que connaît l'Allemagne.
- "Impact" américain -
Certains observateurs estiment qu'une victoire de Donald Trump contraindrait la coalition à resserrer les rangs, compte-tenu des défis géopolitiques et commerciaux que lancerait un retour au pouvoir du républicain.
"Si Trump gagne, tout porte à croire qu'il n'y aura pas de nouveau gouvernement en Allemagne", affirme à l'AFP la politologue Ursula Münch.
"Quel que soit le résultat des élections, il y aura une certaine dynamique et un impact" sur la situation politique allemande, estime encore la directrice de l'Académie pour l'éducation politique de Tutzing, en Bavière (sud).
Si Donald Trump est élu et décide de réduire l'aide à l'Ukraine ou de saper la crédibilité de l'Otan, un gouvernement allemand en capacité d'agir est crucial pour coordonner la réponse européenne. Berlin est le principal pourvoyeur d'aide à Kiev derrière les Etats-Unis.
Les ruptures de coalition sont très rares en Allemagne et Olaf Scholz, chancelier depuis fin 2021, semble vouloir mener la sienne jusqu'aux prochaines législatives prévues pour le 28 septembre 2025, même si cet attelage impopulaire est miné par les querelles partisanes.
Il a appelé ses partenaires à faire preuve de "pragmatisme" et non d'"idéologie" pour "relever le défi auquel nous sommes confrontés en ces temps difficiles".
Autre argument contre des élections anticipées : les conservateurs du parti chrétien-démocrate (CDU/CSU) sont largement en tête dans les sondages et leur chef, Friedrich Merz, deviendrait très probablement chancelier si un vote avait lieu en mars, la date d'un possible scrutin.
- "Crise à combustion lente" -
Mais le fossé entre les partis de la coalition est devenu plus évident ces derniers jours, avec la fuite d'un document du ministre des Finances libéral dont les proposition en vue d'un "tournant économique" vont à l'encontre de la ligne jusqu'à présent suivie par le gouvernement.
Les désaccords se concentrent sur les solutions pour relancer la première économie européenne menacée de récession pour la deuxième année consécutive.
Les sociaux-démocrates d'Olaf Scholz tentent de préserver leur politique sociale ; les Verts de Robert Habeck font pression pour lutter contre le changement climatique malgré les coûts de la transition tandis que les libéraux sont arc-boutés sur le respect des limites constitutionnelles drastiques de l'Allemagne en matière de déficits budgétaires et de dette.
Le ministre des Finances Chrisitian Lindner réclame notamment la fin de l'"impôt de solidarité" instauré en 1991, initialement pour financer le coût de la Réunification, et l'abandon par l'Allemagne de ses objectifs climatiques plus ambitieux que ceux fixés par l'Union européenne.
Il a qualifié la fin de l'année d'"automne des décisions", laissant entendre que son parti pourrait quitter la coalition s'il n'obtenait pas gain de cause.
"Ne rien faire n'est pas une option", a-t-il déclaré à la veille des rendez-vous de mercredi.
Selon l'analyste Carsten Brzeski, de la banque ING, "le gouvernement allemand vient d'entrer dans la nouvelle phase d'une crise politique à combustion lente qui pourrait être la dernière étape avant l'effondrement final de la coalition gouvernementale".
Y.Amjad--DT