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Le bruit aigu des marteaux et des burins se mêle à la rumeur de la ville: en plein Ouagadougou, hommes, femmes et enfants s'affairent dans l'immense cratère de la mine de granit de Pissy, pour gagner quelques euros.
En 40 ans, ce terrain vague situé dans le quartier de Pissy, au milieu des routes et des habitations, est devenu peu à peu un gigantesque trou de dizaines de mètres de profondeur, creusé à la force des bras.
Du haut du cratère, on peut apercevoir en contrebas une femme qui hisse des plaques de granit de plusieurs kilos sur sa tête.
Comme elle, des dizaines de forçats font un ballet incessant d'allers-retours, souvent simplement chaussés de tongs, sur l'étroit chemin escarpé qui remonte du fond de la carrière.
Dans ce décor à la Mad Max, le rôle de chacun est bien défini.
Au fond du trou, des "propriétaires de parcelle" vendent des blocs de granit, d'autres sont payés pour les remonter à la surface pour des femmes et des adolescents qui les concassent en petits cailloux avant de les vendre.
Chacun y fait un petit bénéfice, généralement un ou deux euros par jour.
"Avec cet argent je dois nourrir les enfants, payer leur école, c’est vraiment difficile. Je suis là depuis 10 ans et jusqu’à présent je ne m’en sors pas. Ca fait vraiment pitié", raconte à l'AFP, Abarat Nikiéma en concassant du granit.
Les morceaux iront sur des chantiers pour fabriquer des immeubles, des dalles ou des routes.
Il est 9h00 ce samedi matin, lorsque tout à coup une nuée de femmes, parfois avec des bébés au dos, accourent avec leurs bassines remplies de morceaux de granit sur la tête.
- Accidents et maladies -
Les acheteurs sont là et elles s'empressent de déverser leur "récolte" pour empocher les quelques francs CFA qui permettront de nourrir la famille.
L'odeur de pneu brûlé prend rapidement à la gorge. Car au fond de la carrière, pour casser le granit, les "mineurs" utilisent le système D: un mélange de pneus de camions et de ferraille qui brûle pendant des jours pour fragiliser la pierre et ainsi pouvoir la casser.
Maxime Sidibé est l'un d'eux. Sa petite fille de deux ans à ses côtés, il raconte les conditions difficiles de son quotidien.
"Il y a de graves blessures, des gens coupés par des cailloux, un coup de marteau, des éclats dans les yeux. Il y a des gens qui glissent dans la descente et aussi beaucoup de maladies", confie t-il.
Ici personne ne porte de masque, de casque ou de protection particulière et tout le monde respire les fumées toxiques à longueur de journée.
Dimanche dernier, les mineurs ont entendu des tirs dans le camp Lamizala qui jouxte la carrière.
Le début des mutineries qui a conduit à un coup d'Etat le lendemain, n'a pas perturbé le quotidien de cette mine sauvage.
"On a eu peur, mais on a continué! On n'a pas le choix!", sourit Marcel Koala, un vendeur de granit.
X.Wong--DT