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Plus d'un demi-million d'électeurs dans la dernière monarchie absolue d'Afrique, Eswatini, ont été appelés vendredi à choisir leurs députés lors d'un scrutin qui ne devrait cependant pas changer la donne dans le royaume tenu d'une main de fer par le roi Mswati III.
Les bureaux de vote ont fermé aux alentours de 17H00 GMT et le dépouillement a commencé. Les résultats doivent être annoncés dans les prochains jours.
A la nuit tombée à Mbabane, le principal bureau de vote de la capitale attirait encore quelques poignées de sujets aspirant, sans grande illusion, à l'avènement de la démocratie dans le petit pays anciennement appelé Swaziland, enclavé entre l'Afrique du Sud et le Mozambique.
"Nous voulons pouvoir élire le Premier ministre et avoir notre mot à dire. Mais dans le pays, si vous vous battez contre le roi, vous devenez un ennemi public", témoigne auprès de l'AFP Nozipho Dlamini.
Près d'un tiers seulement des inscrits de ce bureau de vote se sont présentés, selon le responsable, Ldudusi Masilela, 54 ans. Il affirme que "les élections sont justes et équitables car la chance est donnée à chacun de s'exprimer dans les urnes".
Près du fastueux palais royal de Ludzidzini, à environ 25 km de Mbabane, les électeurs sont venus là aussi au compte-gouttes tout au long de la journée. Certains étaient vêtus de tenues traditionnelles: les hommes, en sandales et tissus souvent ornés d'une tête de lion, les femmes, avec un foulard sur les cheveux et des tissus colorés noués sous les aisselles.
"On a besoin de toilettes dans nos maisons et d'emplois", a dit à l'AFP Sithembiso Bandal, 21 ans, sortant d'un isoloir en plastique. Il raconte que "le roi est bon et donne à son peuple", par exemple lorsque les frais de scolarité sont trop lourds. Mais comme près de la moitié de la jeunesse du pays, le jeune homme ne trouve pas de travail.
Critiqué pour mener un train de vie extravagant parmi une population de 1,2 million d'habitants dont près des deux tiers vit sous le seuil de pauvreté, Mswati III détient une fortune personnelle estimée à au moins 50 millions de dollars par le magazine Forbes.
- "Dictature" -
Les partis politiques sont interdits dans le pays depuis 50 ans et les formations politiques opposées au régime sont enregistrées en tant qu'associations ou ONG.
Les postulants à l'un des 59 sièges de députés en jeu se sont présentés vendredi sans étiquette partisane et ont été sélectionnés dans les circonscriptions par des chefs traditionnels, qui veillent le plus souvent aux intérêts du roi. Seule une poignée de candidats défendent un agenda pro-démocratie.
"Nous sommes encore dans une dictature menée par un monarque absolu qui détient tous les pouvoirs. Nous voulons faire entendre notre voix au Parlement et appeler à la démocratie", explique Thantaza Silolo, porte-parole de la première formation d'opposition, le Mouvement de libération du Swaziland (Swalimo).
L'opposition s'organise souvent depuis l'étranger et sur la base fragile d'une Constitution qui garantit, en théorie, les libertés d'expression et d'opinion, ainsi que le droit de réunion et d'association. La plupart des organisations d'opposition avaient appelé à boycotter le scrutin de vendredi estimé joué d'avance.
Ces dernières années, le royaume a été secoué par des protestations pro-démocratie. La violente répression par la police et l'armée du roi a fait une quarantaine de morts en 2021. Dans la foulée, un député affilié à l'opposition, élu en 2018, a été contraint à l'exil. Deux autres ont été jetés en prison.
Le scrutin s'est déroulé dans le calme mais selon certains, la colère n'est pas éteinte: "Des troubles peuvent se produire à nouveau. Les clivages politiques sont toujours là", met en garde Bongmusa Dlamini, un chômeur de 33 ans.
K.Al-Zaabi--DT