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Pour la première fois, des scientifiques ont identifié un type de phéromones sexuelles jouant un rôle dans la reproduction de la mouche tsé-tsé, une découverte qui pourrait aider à combattre cet insecte vecteur de maladies dévastatrices en Afrique subsaharienne.
"Cela pourrait être utilisé dans des pièges plus efficaces pour capturer les mouches tsé-tsé", a expliqué à l'AFP John Carlson, co-auteur de l'étude révélant ces résultats, parue jeudi dans la revue Science. Des tests sont d'ores et déjà prévus au Kenya, a ajouté ce professeur de biologie à l'université de Yale.
Les mouches tsé-tsé, qui ne sont présentes qu'en Afrique subsaharienne, transmettent la trypanosomiase, une maladie touchant à la fois les humains (trypanosomiase humaine africaine, plus connue sous le nom de maladie du sommeil), et le bétail (nagana).
Elle représente une menace pour des millions de personnes dans des dizaines de pays, et cause la mort d'environ trois millions d'animaux d'élevage chaque année, représentant une perte directe de jusqu'à 1,2 milliard de dollars par an, selon un article de commentaire indépendant publié simultanément dans Science. Il s'agit ainsi d'une cause de pauvreté rurale majeure dans cette région.
Source d'inquiétude: la zone géographique où elles évoluent pourrait en outre s'étendre à cause du changement climatique, note l'étude.
Malgré plus d'un siècle de recherches sur cet animal, la communication chimique des mouche tsé-tsé restait mal comprise, et les scientifiques n'avaient encore jamais réussi à identifier chez elles de phéromones volatiles (agissant à distance). Or les phéromones sont déjà utilisés contre d'autres insectes, comme certaines mites.
Les phéromones sont une substance chimique émise par un animal, ayant un effet sur le comportement de congénères. Ils permettent aux insectes de se reconnaître entre eux dans un environnement où évoluent potentiellement des milliers d'autres espèces.
- Appât -
Pour leurs recherches, les scientifiques ont fait baigner des mouches tsé-tsé durant 24 heures dans un solvant. Les extraits ont ensuite été appliqués sur des leurres en forme de mouches. Seuls les extraits de mouches femelles ont attiré les mâles placés en présence des leurres.
Les chercheurs ont par la suite utilisé une technique d'analyse (combinant chromatographie et spectrométrie) pour isoler plusieurs composés chimiques. Au termes de multiples tests, ils ont déterminé que l'un d'eux agissait comme un aphrodisiaque, et était détecté par les antennes des mâles, activant leurs neurones olfactifs.
"Il s'agit non seulement d'un appât, mais il a aussi pour effet que la mouche s'immobilise, elle s'arrête de bouger", a expliqué John Carlson. Une propriété qui permettrait d'aider à les garder dans les pièges.
Les pièges sont déjà l'une des techniques utilisées pour réguler la population de mouches tsé-tsé, mais ils utilisent actuellement des odeurs d'animaux pour les attirer.
"Nous nous attendons à ce que les phéromones améliorent l'efficacité des pièges", a déclaré John Carlson. De plus, le composé chimique identifié "est moins volatil que les odeurs d'animaux utilisées actuellement, et donc resterait plus longtemps dans les pièges".
Le type de phéromone identifié dans cette étude ne devrait toutefois pas être efficace contre toutes les espèces de mouches tsé-tsé. L'étude s'est concentrée sur une espèce (Glossina morsitans) vectrice importante de la maladie pour le bétail. Mais les tests se sont révélés moins concluants sur une autre espèce (Glossina fuscipes), associée au plus grand nombre de cas de maladie chez les humains, selon les chercheurs.
Ils espèrent toutefois que la technique développée leur permettra d'identifier des phéromones comparables pouvant fonctionner pour cette seconde espèce.
A.Murugan--DT