AEX
5.1700
Un procureur russe a requis jeudi neuf ans et demi de prison contre la star américaine du basket féminin Brittney Griner, détenue en Russie pour des accusations de trafic de cannabis, en pleines tensions entre Moscou et Washington.
Depuis son arrestation en février dans un aéroport de Moscou, quelques jours avant l'offensive russe en Ukraine, la double championne olympique est plongée dans la crise géopolitique qui oppose la Russie aux Etats-Unis.
Son procès s'est accéléré ces derniers jours, alors que les deux pays négocient un échange de prisonniers dont la joueuse pourrait faire partie, Washington affirmant avoir récemment fait une offre "conséquente" à Moscou.
"Je demande que Griner soit reconnue coupable et condamnée à neuf ans et demi de prison dans une colonie (pénitentiaire) à régime classique", a dit le procureur Nikolaï Vlassenko, selon une journaliste de l'AFP présente au tribunal de Khimki, près de Moscou.
Il s'agit quasiment de la réquisition maximale possible pour ce crime, fixée à 10 ans de prison. Le procureur a aussi demandé de condamner la joueuse à payer une amende d'un million de roubles (environ 16.000 euros au taux actuel).
La décision du tribunal devrait intervenir jeudi en début de soirée.
Agée de 31 ans et mesurant 2,06 mètres, Griner est considérée comme l'une des meilleures basketteuses du monde. Depuis le début du procès, elle est apparue concentrée, répondant aux questions de la cour avec calme et précision.
Jeudi, elle a été une nouvelle fois amenée menottée à la salle d'audience, vêtue d'un t-shirt gris, avant d'être placée dans la cage à barreaux réservée aux prévenus. Avant le début de l'audience, elle a brandi devant les journalistes une photo d'elle entourée de ses coéquipières de basket en Russie.
- "Professionnelle et dévouée" -
La joueuse des Phoenix Mercury était venue en Russie pour jouer pendant l'intersaison américaine, une pratique courante pour les basketteuses de WNBA qui gagnent souvent mieux leur vie à l'étranger qu'aux Etats-Unis.
Elle avait été arrêtée à l'aéroport avec du liquide de vapoteuse à base de cannabis. Elle a reconnu avoir été en possession de cette substance, affirmant toutefois l'avoir apportée en Russie par erreur.
Elle a surtout réfuté tout trafic, soulignant que cette faible quantité de substance n'était que pour sa consommation personnelle, à des fins analgésiques, car elle souffre de douleurs chroniques comme de nombreux sportifs.
Jeudi, le procureur a, lui, assuré qu'elle avait sciemment essayé de "cacher" aux douaniers à l'aéroport le liquide à base de cannabis.
Une avocate de la joueuse, Maria Blagovolina, a demandé à la cour d'acquitter la joueuse américaine, soulignant la faible quantité de liquide incriminé apportée par Griner en Russie.
"Si la cour décide tout de même de (la condamner), alors je lui demande de prendre en compte toutes les circonstances atténuantes et d'imposer une sentence plus légère", a déclaré l'avocate.
"Tous ceux qui connaissent Brittney soulignent son professionnalisme et son dévouement", a ajouté son autre avocat, Alexandre Boïkov.
- Trafiquant d'armes russe -
Une condamnation de la joueuse ouvrirait légalement la voie à un possible échange de prisonniers.
Vendredi, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken et son homologue russe Sergueï Lavrov ont eu leurs premières discussions depuis le début de l'offensive de Moscou en Ukraine.
M. Blinken a indiqué avoir pressé son homologue d'accepter l'"offre conséquente" de Washington à Moscou pour obtenir la libération de Griner et d'un autre Américain détenu en Russie, Paul Whelan, qui purge une peine de 16 ans de prison pour espionnage.
Selon plusieurs médias américains, il s'agirait d'échanger un célèbre trafiquant d'armes russe détenu aux Etats-Unis, Viktor Bout, contre Mme Griner et M. Whelan.
M. Bout, arrêté en Thaïlande en 2008 et qui purge une peine de 25 ans de prison aux Etats-Unis, est surnommé le "marchand de mort". Son parcours hors du commun a été l'une des inspirations du film "Lord of War" dans lequel Nicolas Cage joue un trafiquant d'armes des plus cyniques.
Aucun accord n'a pour l'heure été rapporté et le Kremlin a paru irrité après les déclarations publiques de Washington au sujet des négociations.
Mme Blagovolina, l'avocate de Griner, avait indiqué mardi que la défense de la joueuse n'était pas impliquée dans les négociations, ajoutant que la joueuse n'espérait qu'une chose: "Pouvoir rentrer à la maison."
A.Ansari--DT