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Vêtu de son aube blanche, le curé de Moissac (Tarn-et-Garonne) survole les clochers de sa paroisse à bord d'un petit avion bicolore, bénissant les champs et bétail des agriculteurs dans l'esprit d'une tradition millénaire pratiquement disparue depuis des décennies.
"Je suis arrivé à Moissac en 2016, mais ce n'est que l'année dernière que des agriculteurs m'ont parlé de la +rogation+, une tradition que je ne connaissais pas du tout", explique à l'AFP le curé Pierre Hoan, un Vietnamien de 43 ans.
Les premières rogations - prières et supplications - remontent au Ve siècle en France, et prenaient la forme de processions principalement destinées aux bonnes récoltes, rappelle le diocèse de Montauban dans un communiqué.
"De nos jours, les paroisses où elles sont célébrées sont devenues une rareté", précise le texte.
Préoccupé par la situation des agriculteurs, durement affectés depuis des mois par des périodes de gel et de fortes chaleurs, le père Hoan s'est donc lancé le défi de survoler les 16 clochers de sa paroisse, pour bénir les champs et le bétail quelques jours avant l'Ascension.
"En soi, ce n'est pas l'avion qui importe, mais le fait de rappeler et faire revivre des traditions", estime le curé, lui-même ancien riziculteur au Vietnam.
Devant le clocher de Saint-Avit, un quartier rural de Moissac, Annie Laflorentie, une agricultrice à la retraite, attend fébrilement, le regard tourné vers le ciel.
- "J'y crois" -
Avec une quinzaine de personnes, ils ont fabriqué une grande croix avec des palettes recouvertes d'un tissu blanc, sur laquelle ils ont déposé des roses de toutes les couleurs, ainsi que du blé, des cerises, pommes et asperges... et une photo de vaches.
Au passage du petit avion biplace rouge et blanc, duquel le curé aspergeait d'eau bénite, les cloches ont sonné et les bras se sont levés. Une prière a ensuite été entonnée.
"Monsieur le curé est dans un avion, ça correspond à notre époque. Avec 16 clochers, je ne vois pas comment il aurait pu faire ça à pieds", sourit Mme Laflorentie, 69 ans.
"Quand j'étais enfant, les rogations se faisaient tôt le matin et les agriculteurs préparaient de l'eau bénite, une croix, des fleurs du champs et du blé pour le passage du curé", se souvient-elle avec nostalgie.
Un peu plus loin, Brigitte Caulet, éleveuse de bovins, est tout aussi émue.
"Je ne connaissais pas cette tradition, c'était ma première rogation", sourit l'agricultrice de 59 ans.
"Personnellement ça me donne du courage. Bien sûr que j'y crois et je souhaiterais que ça se fasse tous les ans!", poursuit-elle.
Aux commandes du petit avion Piper, Léo Carussi, un maraîcher passionné d'aéronautique, confie avoir immédiatement accepté de participer à cette expérience quand des agriculteurs l'ont contacté.
"Il y a certaines personnes qui y croient, alors pourquoi pas! Et puis ça permet de préserver une tradition ancienne et je trouve ça bien", ajoute le pilote qui n'exclut pas de se prêter une nouvelle fois au jeu l'année prochaine.
A.Hussain--DT