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Un procès pour déterminer la responsabilité du géant minier australien BHP dans la rupture dévastatrice d'un barrage de résidus toxiques en 2015 au Brésil s'est ouvert lundi à Londres, relançant l'espoir de centaines de milliers de victimes qui réclament 36 milliards de livres d'indemnisations.
"Ici, la justice sera rendue et ils seront punis pour leur crime. Je ne pense pas que ce sera le cas au Brésil", a affirmé lundi à l'AFP Ana Paula Alexandre, 49 ans, juste avant l'ouverture du procès à la Haute-Cour de Londres.
Son mari, Edinaldo Oliveira de Assis, travaillait sur le barrage et a été tué lors de la catastrophe. Elle attend beaucoup du procès au Royaume-Uni, qui a débuté lundi aux alentours de 10H30, car elle dit n'avoir "pas l'impression d'être entendue au Brésil".
"Je n'ai accepté aucune compensation" financière au Brésil, ajoute-t-elle. "Aucune somme d'argent ne remplacerait ce que j'ai perdu. Mais ce qu'ils m'ont proposé était loin d'être suffisant".
Une gigantesque coulée de boue de déchets toxiques s'était répandue sur 650 kilomètres le long du fleuve Rio Doce, jusqu'à l'océan Atlantique, après la rupture le 5 novembre 2015 de ce barrage de déchets miniers près de la ville de Mariana, dans l'Etat de Minas Gerais (sud-est).
La catastrophe écologique a entraîné la mort de 19 personnes, privé plus de 600 personnes de leur foyer, tué des milliers d'animaux et dévasté des zones de forêt tropicale protégée.
L'édifice retenait les résidus d'une mine de fer appartenant à Samarco, société brésilienne détenue conjointement par le brésilien Vale et l'australien BHP.
- 620.000 plaignants -
Après plusieurs rebondissements devant la justice britannique, l'énorme procès civil qui doit déterminer l'éventuelle responsabilité de BHP s'est ouvert d'emblée sur la question technique de la structure du groupe.
BHP avait à l'époque des faits deux sièges, dont un à Londres, ce qui explique ce procès dans la capitale britannique - mais il s'est aujourd'hui recentré sur l'Australie.
Le procès doit s'achever début mars. Le montant des dommages et intérêts réclamés promet d'être gigantesque : il est évalué "à 36 milliards de livres" (43 milliards d'euros) par les avocats des plaignants, à la hauteur de leur nombre, plus de 620.000, dont 46 municipalités brésiliennes, des entreprises et plusieurs peuples autochtones.
Lundi matin, huit victimes avaient fait le déplacement, dont certaines en habits traditionnels agitaient devant le tribunal des maracas et interpelaient les passants au mégaphone, réclamant la "justice pour Mariana".
"Au Brésil, les sociétés minières sont très puissantes et ont une grande influence politique. J’espère que la justice sera rendue ici. Au Brésil, c’est sans espoir", lance Gelvana Rodrigues, 37 ans, dont le fils de 7 ans avait été emporté et son corps retrouvé 100 kilomètres plus loin.
BHP, qui assure que l'eau du fleuve a retrouvé sa qualité depuis, se dit "pleinement conscient des impacts" de la catastrophe et "inébranlable" dans sa volonté d'indemnisation, mais juge ce procès britannique "inutile", estimant l'affaire "déjà couverte" par les procédures brésiliennes.
- Poursuites pénales -
Le groupe assure que plus de 430.000 personnes ont déjà reçu compensation via la fondation Renova, qui gère les indemnisation et réhabilitations au Brésil, dont plus de 200.000 plaignants du procès à Londres.
Des poursuites pénales sont par ailleurs en cours au Brésil, ainsi que d'autres procédures civiles aux Pays-Bas et en Australie.
Mais "près de neuf ans se sont écoulés et personne n'a vu sa responsabilité reconnue", pointe auprès de l'AFP Tom Goodhead, directeur général de Pogust Goodhead, le cabinet londonien des plaignants. A ce jour "personne n'est allé en prison, il n'y a pas de condamnation pénale".
BHP et Vale ont revu à la hausse vendredi une proposition globale d'indemnisation à la justice brésilienne, à 170 milliards de réais (27,6 milliards d'euros), dans l'espoir de mettre un point final à la majorité des procédures dans ce pays. Ce montant est toujours en négociation.
Mais "beaucoup des victimes que je représente ne font tout simplement pas confiance aux entreprises", reprend l'avocat, qui estime que la majorité des personnes indemnisées à ce jour au Brésil n'ont reçu "que quelques centaines de livres".
La décision de la justice britannique n'est pas attendue avant le 2e trimestre de l'an prochain, selon BHP. Si sa responsabilité était reconnue, un autre procès serait organisé, sans doute fin 2026, pour évaluer le montant des dommages de chaque plaignant.
I.Khan--DT