Dubai Telegraph - 20 ans après la guerre, Moscou traque toujours les Tchétchènes en Europe

EUR -
AED 3.82663
AFN 70.961809
ALL 98.138672
AMD 405.653176
ANG 1.877183
AOA 951.190967
ARS 1044.167695
AUD 1.599646
AWG 1.877898
AZN 1.768925
BAM 1.955574
BBD 2.102957
BDT 124.465633
BGN 1.955296
BHD 0.392555
BIF 3076.644867
BMD 1.04183
BND 1.403838
BOB 7.197169
BRL 6.043616
BSD 1.04158
BTN 87.914552
BWP 14.229358
BYN 3.408607
BYR 20419.862965
BZD 2.099458
CAD 1.456197
CDF 2991.093261
CHF 0.930624
CLF 0.036923
CLP 1018.831698
CNY 7.545955
CNH 7.559141
COP 4573.372102
CRC 530.538761
CUC 1.04183
CUP 27.608488
CVE 110.252274
CZK 25.306722
DJF 185.47859
DKK 7.457725
DOP 62.772754
DZD 139.835859
EGP 51.650195
ERN 15.627446
ETB 127.508482
FJD 2.371152
FKP 0.822334
GBP 0.831137
GEL 2.854575
GGP 0.822334
GHS 16.4561
GIP 0.822334
GMD 73.969495
GNF 8977.963687
GTQ 8.040072
GYD 217.904848
HKD 8.10981
HNL 26.320962
HRK 7.431641
HTG 136.724218
HUF 410.920048
IDR 16610.464601
ILS 3.856615
IMP 0.822334
INR 87.968197
IQD 1364.442504
IRR 43834.985936
ISK 145.522363
JEP 0.822334
JMD 165.930847
JOD 0.738756
JPY 161.24407
KES 134.88443
KGS 90.11281
KHR 4193.515949
KMF 492.261294
KPW 937.646374
KRW 1463.260366
KWD 0.320727
KYD 0.868
KZT 520.05997
LAK 22878.359185
LBP 93271.23384
LKR 303.145008
LRD 187.9983
LSL 18.79533
LTL 3.076253
LVL 0.630192
LYD 5.086413
MAD 10.478091
MDL 18.997807
MGA 4861.438851
MKD 61.522899
MMK 3383.822366
MNT 3540.137411
MOP 8.350936
MRU 41.443216
MUR 48.810137
MVR 16.1068
MWK 1806.091526
MXN 21.300719
MYR 4.654898
MZN 66.582998
NAD 18.79533
NGN 1767.669283
NIO 38.325576
NOK 11.541432
NPR 140.663763
NZD 1.785677
OMR 0.400944
PAB 1.04158
PEN 3.949544
PGK 4.193516
PHP 61.40439
PKR 289.239713
PLN 4.332887
PYG 8131.061444
QAR 3.798562
RON 4.980248
RSD 116.991496
RUB 108.510536
RWF 1421.83588
SAR 3.911475
SBD 8.734237
SCR 14.271984
SDG 626.658476
SEK 11.49581
SGD 1.402926
SHP 0.822334
SLE 23.680862
SLL 21846.653733
SOS 595.231293
SRD 36.978666
STD 21563.772237
SVC 9.113948
SYP 2617.628337
SZL 18.788831
THB 36.0395
TJS 11.09252
TMT 3.646404
TND 3.309018
TOP 2.440069
TRY 35.958741
TTD 7.074183
TWD 33.946456
TZS 2770.580196
UAH 43.090026
UGX 3848.555767
USD 1.04183
UYU 44.294887
UZS 13362.457591
VES 48.506696
VND 26482.270241
VUV 123.688121
WST 2.908362
XAF 655.881293
XAG 0.033274
XAU 0.000384
XCD 2.815597
XDR 0.792309
XOF 655.881293
XPF 119.331742
YER 260.379266
ZAR 18.844783
ZMK 9377.714007
ZMW 28.772679
ZWL 335.468752
  • AEX

    13.6800

    879.8

    +1.58%

  • BEL20

    69.4500

    4228.29

    +1.67%

  • PX1

    41.8400

    7255.01

    +0.58%

  • ISEQ

    17.2700

    9613.97

    +0.18%

  • OSEBX

    3.8100

    1468.66

    +0.26%

  • PSI20

    48.3400

    6409

    +0.76%

  • ENTEC

    -5.8300

    1416.23

    -0.41%

  • BIOTK

    86.5000

    2989.04

    +2.98%

  • N150

    24.5300

    3295.3

    +0.75%

20 ans après la guerre, Moscou traque toujours les Tchétchènes en Europe
20 ans après la guerre, Moscou traque toujours les Tchétchènes en Europe / Photo: ALEX HALADA - AFP

20 ans après la guerre, Moscou traque toujours les Tchétchènes en Europe

Leur capitale Grozny a subi le même sort que Marioupol, écrasée sous les bombes russes. Plus de deux décennies après, les Tchétchènes réfugiés en Europe vivent toujours dans la peur de Moscou.

Taille du texte:

Ils sont des dizaines de milliers à avoir fui la petite république russe à majorité musulmane ravagée par deux guerres meurtrières. La dernière, déclenchée en 1999 par Vladimir Poutine, a abouti à la mise en place à sa tête du redoutable Ramzan Kadyrov, fidèle du Kremlin accusé de réprimer impitoyablement ses détracteurs.

L'Autriche, pays de 9 millions d'habitants, en accueille quelque 35.000, la plus grande communauté en diaspora par habitant, sur 250.000 en Europe.

A Vienne, ils vivent dans un quartier populaire du nord-est de la ville aux bâtisses d'après-guerre sans cachet et aux barres d'immeubles où les hommes sont souvent employés comme agents de sécurité pendant que les femmes élèvent les enfants.

Mais, sous ces apparences de tranquillité dans les rues aux pizzerias modestes, boutiques de robes de mariée typiques de là-bas ou commerces d'alimentation, des dizaines de réfugiés ont raconté à l'AFP être pris en tenailles.

Les uns craignent d'être renvoyés du jour au lendemain en Russie, au risque d'être torturés ou tués selon des organisations des droits de l'Homme, alors que les extraditions se sont accélérées au motif de la lutte antiterroriste depuis des attentats commis par des islamistes tchétchènes dans l'Union européenne (UE).

Les autres vivent dans l'angoisse d'être la cible des commandos de "Kadyrovtsy", ces hommes de main de Ramzan Kadyrov accusés par des ONG de traquer ses opposants sans relâche, y compris à l'étranger.

- Notice rouge -

Jusqu'en février dernier, Zorbek Nazouïev, grand-père trapu à la longue barbe grise exilé en Autriche depuis 18 ans, n'avait plus entendu parler de la Russie.

Après avoir rejoint pendant la première guerre (1994-1996) les "boïeviki", ces combattants tchétchènes qui ont affronté les troupes fédérales russes, il avait suite au deuxième conflit pris la fuite par crainte de représailles et reconstruit sa vie en Autriche avec ses nombreux enfants.

Et puis cette lettre du parquet autrichien est arrivée, l'informant de son inculpation pour meurtre et acte de terrorisme. Selon le document consulté par l'AFP, il est accusé d'avoir participé à des massacres de civils russes en 1995.

Lui nie avoir "tué des innocents" et rappelle qu'il "se défendait alors contre l'envahisseur" russe. "On réécrit l'histoire", s'emporte le quinquagénaire qui s'exprime sous un nom d'emprunt.

L'homme se demande si cette volonté de le juger n'est pas plutôt liée à la présence dans sa famille d'un jihadiste parti combattre en Syrie dans les rangs de l'Etat islamique.

En dépit des nombreuses requêtes de l'AFP, les autorités autrichiennes en charge de ce dossier ont refusé de s'exprimer. Il n'a pas été possible non plus de parler à des sources judiciaires et policières, silencieuses sur ce sujet sensible.

En 2006, l'UE a conclu un accord de réadmission avec le gouvernement russe facilitant le retour des personnes condamnées en justice ou faisant l'objet d'une notice rouge d'Interpol émise par Moscou.

- Vols charters -

Des Tchétchènes ont depuis été expulsés par centaines - aucunes statistiques officielles ne sont disponibles, ce dont s'insurgent régulièrement des organisations internationales.

Dans un rapport de 2017, le Conseil de l'Europe avait dénoncé "le détournement abusif du système" d'Interpol par certains États pour "persécuter des opposants politiques à l'étranger".

La notion de prévention des risques s'est installée en Occident.

Selon la communauté tchétchène, les pays de l'UE ont durci leur politique par crainte des attentats.

"Il y a très clairement une alerte qui est donnée au niveau des services" pour essayer d'empêcher de futurs passages à l'acte, estime Anne le Huérou, spécialiste des conflits post-soviétiques à l'université Paris-Ouest Nanterre.

Après l'assassinat en France de l'enseignant Samuel Paty en octobre 2020 par un réfugié tchétchène, l'Autriche a ainsi créé une force d'intervention pour lutter contre "les tendances extrémistes" et les "sociétés parallèles" au sein de cette communauté.

Frappé pour la première fois sur son sol un mois plus tard lors d'un attentat à Vienne et accusé de négligence dans la surveillance de la nébuleuse radicale, le pays alpin redouble depuis de prudence.

En décembre 2021, il a organisé un vol charter pour dix personnes, vantant une "coopération efficace en matière de rapatriement" avec la Russie.

Interrogé par l'AFP, le gouvernement affirme que "quatre ressortissants russes sont actuellement en détention en vue d'une expulsion". Malgré l'arrêt des liaisons commerciales avec la Russie en raison des sanctions liées à la guerre en Ukraine, les expulsions sont toujours d'actualité selon le ministère autrichien de l'Intérieur.

- Torturé à Grozny -

"Plutôt que d'y retourner, je préfère me tuer ici", lâche épouvanté Zorbek Nazouïev, handicapé, dit-il, après avoir été torturé à l'électricité pendant la répression en Tchétchénie.

S'il est reconnu coupable, il risque un retrait de son statut de réfugié et une extradition.

Aux autorités européennes, aux exilés tchétchènes renvoyés en Russie, Moscou promet systématiquement un bon traitement.

Pourtant, plusieurs d'entre eux ont disparu, ont été torturés ou condamnés sur des charges que des ONG considèrent comme "fabriquées" ou bien ont été tués.

Le 4 avril dernier, l'organisation russe Memorial a épinglé la France pour être restée sourde aux suppliques d'un jeune homme.

Daoud Mouradov, né en 2002, a été expulsé en décembre 2020 sur fond d'inquiétudes pour la sûreté de l'Etat. Fin 2021, il a été transporté vers une prison de Grozny où il a été torturé, selon l'emblématique ONG récemment dissoute par Moscou.

Ses proches ont été informés de sa mort en février. Ils n'ont pas obtenu les conclusions de l'examen médico-légal et n'ont pas pu récupérer son corps, a détaillé la même source.

- Abattu à Vienne -

Quand ils ne risquent pas l'extradition, les Tchétchènes craignent les commandos envoyés par Kadyrov, accusé de faire liquider ses adversaires là où ils se cachent.

Le rôle du dirigeant tchétchène, au pouvoir dans le territoire caucasien depuis 2007, a été spécifiquement pointé par la justice autrichienne dans l'assassinat par balles à Vienne en janvier 2009 de l'un de ses opposants qui avait témoigné publiquement de ses atteintes aux droits de l'Homme.

Ce dossier "empêche encore de dormir" son avocate, a-t-elle confié à l'AFP. Me Nadia Lorenz estime que "la correspondance entre les tribunaux autrichiens et le tribunal de Grozny a permis de localiser la résidence" de son client.

Quelques jours avant d'être abattu, Oumar Israïlov, jeune père de quatre enfants, avait demandé en vain une protection policière, remarquant qu'on le suivait dans la rue.

Le jugement a mis en lumière le mode opératoire de la Russie. Pour le parquet, Ramzan Kadyrov était le donneur d'ordres.

Selon la veuve de la victime, le dirigeant tchétchène avait appelé deux fois son mari avant le meurtre, pour exiger qu'il rentre immédiatement.

Kadyrov n'a jamais été inquiété: les demandes de coopération judiciaire adressées à Moscou sont restées lettres mortes.

L'activiste quadragénaire tchétchène Rosa Dounaïeva affirme que d'autres meurtres mis sur le compte des "Kadyrovtsy" ont eu lieu: à Istanbul en septembre 2011, à Lille (France) en janvier 2020, à Vienne encore en juillet 2020.

- Vie en sursis en Europe -

"On nous associe dans les médias seulement à la criminalité et à l'extrémisme religieux alors que la majorité des Tchétchènes, qui vivent dans l'angoisse, rasent les murs et ne font plus de politique", assure en marge de l'une des manifestations régulières qu'elle organise pour dénoncer les expulsions Mme Dounaïeva, vendeuse à mi-temps.

Il y a de multiples exemples d'intégration réussie en Autriche, comme le judoka Chamil Borchachvili, 26 ans, revenu des JO de Tokyo en 2020 avec une médaille olympique gratifiante pour le pays.

Ou comme Zelimkhan Kazan, 19 ans. Le jeune homme, cheveux noirs et veste à motifs camouflage, est né en Autriche. Il n'a jamais connu la Tchétchénie. Il poursuit ses études d'informatique, a déjà monté deux projets de start-up et paie des impôts.

"Je travaille et j'ai tout ce qu'il me faut mais je ne me sens pas à 100% en sécurité", regrette cet adepte des arts martiaux mixtes (MMA) en pleine séance de musculation près du canal du Danube.

"Pas question de faire des conneries qu'on passerait à un ado autrichien: pour moi, c'est l'arrêt de mort."

Zelimkhan Kazan, qui n'a pas de papiers officiels russes - juste un laisser-passer autrichien - ne peut pas se faire naturaliser dans ce pays où prévaut le strict droit du sang.

Compliqué, alors qu'à Vienne des policiers en civil le contrôlent "trois ou quatre fois par mois", poursuit le jeune homme qui préfère aussi rester anonyme. "Certains me traitent de tafiole, espérant une réaction violente."

Tous les réfugiés tchétchènes rencontrés par l'AFP disent être ciblés par les forces de l'ordre, le moindre geste envers un fonctionnaire pouvant mener à une condamnation puis à l'expulsion.

En juillet 2021, des policiers ont été condamnés après la révélation d'images de vidéosurveillance les montrant en train de tabasser un Tchétchène en se croyant à l'abri des regards.

Zelimkhan Kazan doit aussi se méfier des "Kadyrovtsy" qu'il reconnaît à leurs grosses voitures et à leur assurance. Quand il les croise, il ajuste sa capuche pour que l'on ne lui pose pas de questions.

Rosa Dounaïeva s'inquiète de l'emprise grandissante de Ramzan Kadyrov sur les jeunes nés dans l'UE. "Quand il ne les tue pas, il leur lave le cerveau, les dresse contre nous ou contre l'Occident".

Les Tchétchènes parlent des "deals" de cocaïne qui détruisent la vie de nombre d'entre eux, privés d'avenir et pris dans un système de clans mafieux. Des filles se plaignent, elles, d'être entravées dans leur liberté par des "grands frères".

Désabusés par les discriminations, certains tombent dans le piège de Ramzan Kadyrov, qui arrive à les séduire via les réseaux sociaux où il compte des millions d'adeptes et sème la division dans les familles.

"Le régime met en valeur les possibilités de carrière pour ceux qui, formés en Europe, regagneraient la Tchétchénie", explique la chercheuse Anne Le Huérou. "La propagande homophobe et la mise en valeur de la masculinité peuvent aussi faire recette".

Depuis le début de l'offensive de Moscou en Ukraine, un "millier" de volontaires envoyés par Ramzan Kadyrov se battent aux côtés des Russes. En face, certains sont partis prêter main forte aux Ukrainiens, selon plusieurs sources interrogées par l'AFP.

Et parmi les millions de réfugiés qui ont fui les bombardements, une jeune Tchétchène, venue avec son fils, a été arrêtée en Roumanie, selon la justice, qui a prononcé son extradition. Accusée de "participation à un groupe armé à des fins contraires à la Fédération russe", son appel a été rejeté mercredi.

J.Alaqanone--DT