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L'ex-président brésilien Jair Bolsonaro a qualifié samedi de "dictateur" le juge de la Cour suprême qui a ordonné la suspension du réseau social X, lors d'une manifestation à Sao Paulo qui a rassemblé moins de soutiens que par le passé.
Des dizaines de milliers de personnes étaient tout de même massées sur l'avenue Paulista, artère emblématique de la plus grande mégalopole d'Amérique latine, habillées en jaune et vert, les couleurs du drapeau brésilien.
À l'occasion de la fête nationale de l'indépendance, et à un mois des élections municipales au Brésil, les mots d'ordre de ce rassemblement étaient la défense de la "démocratie" et de la "liberté", mais aussi la destitution du juge Alexandre de Moraes, qui a bloqué la semaine dernière l'accès au Brésil à la plateforme appartenant à Elon Musk.
"Nous devons mettre un frein à ceux qui dépassent les limites de notre Constitution", a scandé M. Bolsonaro, juché sur une estrade.
Il a ensuite évoqué la demande de destitution contre le juge Moraes qui devrait être déposée lundi au Sénat par des parlementaires de droite. Cette démarche à l'issue pour l'heure très incertaine est soutenue à coup de posts par Elon Musk.
"J'espère que le Sénat va mettre un frein à Alexandre de Moraes, ce dictateur qui fait encore plus de mal au Brésil que Luiz Inacio Lula da Silva lui-même", le président brésilien, contre qui il a échoué dans sa tentative de réélection en 2022.
Selon les estimations de chercheurs de l'Université de Sao Paulo basées sur l'analyse de photographies aériennes par un programme informatique, environ 45.000 personnes étaient présentes samedi écouter le leader d'extrême droite.
C'est près de quatre fois moins qu'un rassemblement en février qui avait réuni 185.000 manifestants au même endroit, selon la même méthode de calcul, mais plus qu'un autre à Rio de Janeiro en avril (environ 32.000 personnes).
- "Censure" -
Bête noire des bolsonaristes, Alexandre de Moraes était président du Tribunal supérieur électoral quand l'ancien chef de l’État avait été condamné l'an dernier à huit ans d'inéligibilité pour ses attaques sans preuve contre le système d'urnes électroniques. Il conduit aussi la plupart des multiples enquêtes visant M. Bolsonaro.
"Qui est le criminel? Bolsonaro ou Alexandre de Moraes? Alexandre de Moraes doit être destitué et emprisonné, les criminels doivent aller en prison", a lancé sur l'estrade l'influent pasteur Silas Malafaia, un des organisateurs de la manifestation.
La semaine dernière, le juge Moraes a ordonné la suspension de X, reprochant à la plateforme d'avoir ignoré une série de décisions de justice liées à la lutte contre la désinformation.
"Je suis là pour réclamer la destitution d'Alexandre de Moraes, ce qu'il fait est inacceptable. Il ignore la Constitution et il fait la loi à sa façon, en ignorant notre Constitution", a dit à l'AFP Emilia Lapolli, architecte de 35 ans présente dès le début de la manifestation.
"Je veux protester contre la folie en cours en ce moment dans notre pays, on subit la censure !", a lancé pour sa part Sergio Luiz Barreira, informaticien à la retraite.
La manifestation de samedi avait été convoquée avant même la suspension de X, arène privilégiée d'un débat ultra-polarisé au Brésil.
De nombreuses pancartes à l'effigie d'Elon Musk ont été disposées le long de l'avenue Paulista.
La droite, qui fait volontiers du milliardaire son champion, a dénoncé la mesure au nom de la liberté d'expression.
Mais le camp de gauche du président Lula a défendu cette décision drastique.
"Nous serons toujours intolérants avec toute personne, quelle que soit sa fortune, qui défie la législation brésilienne", a averti Lula dans une allocution à la veille de la fête nationale, sans citer nommément l'entrepreneur.
- Scandale -
Le rendez-vous de samedi survient au moment où le gouvernement est affaibli par un scandale. Accusé de harcèlement sexuel par plusieurs femmes, dont une ministre, le ministre des Droits humains Silvio Almeida, qui nie en bloc, a été limogé vendredi soir.
Lula a ouvert samedi matin le défilé officiel à Brasilia dans la Rolls-Royce présidentielle, avant de prendre place en tribune officielle, à quelques mètres du juge Moraes, présent au même titre que de nombreux ministres, parlementaires et autres représentants du pouvoir judiciaire.
M. Bolsonaro avait demandé à ses partisans de ne pas prendre part aux cérémonies de commémoration organisées par le gouvernement.
G.Gopalakrishnan--DT