AEX
-13.0900
Armés de pelles, de masses et de machettes, ils ont travaillé pendant quatre heures pour tenter de déplacer les débris boueux, dans l'espoir que les véhicules puissent enfin passer.
En vain : un pick-up, coincé du mauvais côté du gigantesque monticule, n'a toujours pas pu se frayer un chemin.
Les habitants de KwaNdengezi, un township situé à l'ouest de Durban, sont presque livrés à eux-mêmes depuis qu'une tempête exceptionnelle a frappé la côte Est de l'Afrique du Sud, tuant près de 450 personnes.
Comme des naufragés qui sur une île déserte voient les bateaux au loin, ils ont vu passer les camions-citernes. Aucun n'a pu approcher. Pour les résidents amers, c'est le signe d'un isolement, voire d'un abandon, qui dure maintenant depuis plus d'une semaine.
"On a l'impression d'être rejetés, qu'ils ne se soucient pas de nous", estime Bryson Khumalo, 24 ans. Il dresse, pour les autorités, la liste des résidents prioritaires, ceux dont les maisons ont été emportées par les eaux ou rendues inhabitables. Personne n'est encore venu constater la situation de la communauté, dit-il.
"Nous nous débrouillons seuls. Cela nous met encore plus en colère", ajoute-t-il.
Le pays a décrété l'état de catastrophe nationale après que des pluies record ont inondé des régions entières des provinces du KwaZulu-Natal et du Cap-Oriental. Au moins 448 personnes ont été tuées dans les inondations.
L'armée a annoncé lundi le déploiement de 10.000 hommes pour aider à déblayer les débris, reconstruire les ponts, fournir de l'eau potable et reconnecter les lignes électriques.
Mais mercredi, à KwaNdengezi, aucune aide n'est venue alors qu'une demi-douzaine d'hommes s'efforçaient de dégager une route recouverte de boue.
- "Je tremble" -
Ces inondations sont les pires de mémoire d'homme, et selon les experts le réchauffement climatique a joué un rôle dans leur intensité.
"Je tremble, comme vous pouvez le voir. Je ne suis pas en colère, je suis inquiète", déclare Ntombi Mkhize, 42 ans, mère de trois enfants dont le plus jeune n'a que deux mois.
"A la moindre pluie, à cause de ce souvenir, nous avons l'impression que c'est énorme", dit-elle, ajoutant que la peur lui a causé de nombreuses insomnies. Elle craint les vols, à la faveur des nuits sans lumière.
Privée d'eau courante, elle envoie son fils aîné les ravitailler à des tuyaux cassés, loin de leur maison. Elle allume du feu avec du bois humide pour la faire bouillir avant de la consommer.
Les habitants de la région tentent de récupérer les corps de leurs proches pour les enterrer dignement.
Ntokozo Magcaba, 40 ans, regarde une rivière que des plongeurs de la police et une unité canine inspectent, à la recherche de son fils de 23 ans disparu.
Tous les jours, son mari et des voisins partent à sa recherche. Les sauveteurs ont suivi la rivière pendant plus d'une heure jusqu'à l'endroit où elle se jette dans un cours d'eau plus important. Aucun signe de son fils. "Je suis brisée", dit-elle.
H.Yousef--DT