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Des larmes et des excuses pour clore son dernier interrogatoire. Salah Abdeslam, seul membre encore en vie des commandos jihadistes qui ont fait 130 morts à Paris et Saint-Denis le 13 novembre 2015, a demandé vendredi le "pardon" des victimes.
Depuis mercredi, le principal accusé est interrogé devant la cour d'assises spéciale de Paris.
Mis face à ses contradictions, celui qui avait gardé le silence pendant la quasi-totalité de l'enquête s'accroche à la dernière version qu'il a livrée de son rôle le soir des attentats: il devait se faire exploser dans un bar du XVIIIe arrondissement de Paris mais y a "renoncé" sur place, à la vue de ces jeunes gens qui s'amusaient et qui lui ressemblaient.
En milieu d'après-midi, l'une de ses avocats, Olivia Ronen, s'avance à la barre pour sa dernière série de questions.
"Est-ce que vous regrettez de ne pas avoir eu le +courage+ d'aller jusqu'au bout ?", lui demande-t-elle.
"Je ne regrette pas, je n'ai pas tué ces personnes et je ne suis pas mort", répond-il. "Je me dis... s'ils savaient à côté de quoi ils sont passés", ajoute le Français de 32 ans, collier de barbe noire, sweatshirt gris sur le dos.
C'est en évoquant sa mère que les larmes se mettent à couler sur ses joues, pour la première fois depuis le début du procès en septembre.
"Je voudrais dire aujourd'hui que cette histoire du 13-Novembre s'est écrite avec le sang des victimes. C'est leur histoire, et moi j'en ai fait partie. Ils sont liés à moi et je suis lié à eux", déclare-t-il ensuite, la voix tremblante.
"Je veux présenter mes condoléances et mes excuses à toutes les victimes", continue Salah Abdeslam. "Je vous demande de me pardonner", poursuit-il. "Je sais que la haine subsiste (...) je vous demande aujourd'hui de me détester avec modération".
- "Y réfléchir" -
Il s'adresse ensuite aux trois accusés jugés pour l'avoir aidé dans sa fuite, après les attentats, leur demande de le "pardonner". "J'ai pas voulu (les) entraîner là-dedans".
L'un d'eux, qui comparaît libre, quittera ensuite la salle les yeux remplis de larmes.
"Je sais que ce ça ne va pas vous guérir", conclut Salah Abdeslam. "Mais si ça peut vous faire du bien, si j'ai pu faire du bien à une seule des victimes alors pour moi c'est une victoire".
"C'est tout ce que j'ai à dire", conclut-il ensuite en s'écartant du micro. Le président Jean-Louis Périès suspend l'audience. Dans la salle, pas de réaction sur les bancs clairsemés.
"C'est une surprise", réagit à l'extérieur Georges Salines, dont la fille a été tuée au Bataclan et qui est visiblement secoué. Le pardon, "c'est important qu'il le demande... nous allons y réfléchir", ajoute-t-il.
"Je pense qu'il était sincère", estime de son côté Cédric, un rescapé des attaques, qui souligne cependant le caractère "paradoxal" de Salah Abdeslam, un jihadiste "pas fini" qui semble regretter ce qu'il a fait tout en étant incapable de condamner les actions du reste du commando ou du groupe Etat islamique.
"Chacun a sa vision de ce témoignage et son analyse de ces larmes. Ni mes clients ni moi-même n'avons été émus par cet exercice de style", lâche de son côté Me Gérard Chemla, avocat d'une centaine de victimes.
Dans ce "discours construit et policé", il "a pleuré sur lui et ses amis, pas sur les victimes", ajoute-t-il.
Au tout début de la journée, une avocate des parties civiles avait rappelé à Salah Abdeslam qu'il s'était plaint de "l'image erronée" donnée de lui. Alors, "comment voudriez-vous qu'on se souvienne de vous ?"
"Je veux qu'on ne se souvienne pas de moi", dit Salah Abdeslam. "Je veux être oublié à jamais, je n'ai pas choisi d'être celui que je suis aujourd'hui".
I.Mansoor--DT