Dubai Telegraph - En Russie, la lumière d'une bibliothèque George-Orwell brille encore

EUR -
AED 3.877617
AFN 71.807807
ALL 97.772617
AMD 410.869543
ANG 1.895795
AOA 964.384836
ARS 1057.55224
AUD 1.623661
AWG 1.894435
AZN 1.78834
BAM 1.947856
BBD 2.123957
BDT 125.707294
BGN 1.956859
BHD 0.39796
BIF 3106.857885
BMD 1.055704
BND 1.409166
BOB 7.295246
BRL 6.100939
BSD 1.051925
BTN 88.833685
BWP 14.311832
BYN 3.442492
BYR 20691.802984
BZD 2.120372
CAD 1.477094
CDF 3029.870901
CHF 0.934506
CLF 0.037175
CLP 1025.775052
CNY 7.650481
CNH 7.653977
COP 4637.06472
CRC 534.724154
CUC 1.055704
CUP 27.976162
CVE 109.817103
CZK 25.300695
DJF 187.317785
DKK 7.45859
DOP 63.352214
DZD 140.860582
EGP 52.523718
ERN 15.835564
ETB 129.4699
FJD 2.397768
FKP 0.833285
GBP 0.83341
GEL 2.897931
GGP 0.833285
GHS 16.756657
GIP 0.833285
GMD 74.423577
GNF 9066.109095
GTQ 8.120878
GYD 219.972825
HKD 8.2172
HNL 26.579099
HRK 7.530612
HTG 138.1877
HUF 410.087781
IDR 16788.864432
ILS 3.94277
IMP 0.833285
INR 89.071352
IQD 1377.97981
IRR 44450.426221
ISK 145.296679
JEP 0.833285
JMD 166.842681
JOD 0.748808
JPY 164.518836
KES 136.69227
KGS 91.319811
KHR 4272.614305
KMF 490.66493
KPW 950.13341
KRW 1475.338096
KWD 0.324703
KYD 0.876625
KZT 521.981062
LAK 23064.149669
LBP 94199.393249
LKR 306.054633
LRD 191.45187
LSL 19.016418
LTL 3.11722
LVL 0.638584
LYD 5.131121
MAD 10.510034
MDL 19.118206
MGA 4917.01546
MKD 61.545741
MMK 3428.886171
MNT 3587.28293
MOP 8.433205
MRU 41.865645
MUR 48.857678
MVR 16.310698
MWK 1824.08625
MXN 21.346443
MYR 4.720585
MZN 67.522783
NAD 19.01893
NGN 1768.103947
NIO 38.712475
NOK 11.659599
NPR 142.135636
NZD 1.795711
OMR 0.406451
PAB 1.05191
PEN 3.992018
PGK 4.232776
PHP 62.226904
PKR 292.329865
PLN 4.334394
PYG 8192.663234
QAR 3.836353
RON 4.97638
RSD 116.9868
RUB 105.955952
RWF 1446.926019
SAR 3.963348
SBD 8.835737
SCR 14.11749
SDG 635.001454
SEK 11.611532
SGD 1.417573
SHP 0.833285
SLE 23.857186
SLL 22137.594933
SOS 601.159516
SRD 37.518143
STD 21850.946183
SVC 9.204459
SYP 2652.488409
SZL 19.013721
THB 36.624451
TJS 11.181794
TMT 3.705522
TND 3.314482
TOP 2.472567
TRY 36.389597
TTD 7.142867
TWD 34.361069
TZS 2800.256971
UAH 43.428889
UGX 3873.202862
USD 1.055704
UYU 45.155829
UZS 13490.976078
VES 48.5521
VND 26841.280147
VUV 125.335328
WST 2.947094
XAF 653.301744
XAG 0.034141
XAU 0.000401
XCD 2.853094
XDR 0.800148
XOF 653.301744
XPF 119.331742
YER 263.821137
ZAR 19.125085
ZMK 9502.594831
ZMW 29.059753
ZWL 339.936333
  • AEX

    1.7200

    863.69

    +0.2%

  • BEL20

    40.3400

    4156.76

    +0.98%

  • PX1

    31.8100

    7261.63

    +0.44%

  • ISEQ

    69.2300

    9684.41

    +0.72%

  • OSEBX

    15.2900

    1458.2

    +1.06%

  • PSI20

    14.6300

    6374.38

    +0.23%

  • ENTEC

    -5.8300

    1416.23

    -0.41%

  • BIOTK

    -14.2000

    2769.47

    -0.51%

  • N150

    14.7800

    3298.11

    +0.45%

En Russie, la lumière d'une bibliothèque George-Orwell brille encore
En Russie, la lumière d'une bibliothèque George-Orwell brille encore / Photo: Natalia KOLESNIKOVA - AFP

En Russie, la lumière d'une bibliothèque George-Orwell brille encore

Sur les étagères de la bibliothèque, la vieille dame saisit des livres dont elle connaît naturellement la place. Orwell, Sorokine, Dostoïevski. Des auteurs qui, pour elle, aident à percer les ténèbres de la Russie contemporaine.

Taille du texte:

Dans la pièce, un ordinateur, quelques centaines de livres et une odeur d'huile parfumée, celle que porte Alexandra Karasseva, la responsable de la bibliothèque George-Orwell d'Ivanovo, une ville industrielle à cinq heures de route de Moscou.

En manipulant les ouvrages, Mme Karasseva, 67 ans, disserte sur leur pouvoir : "Les livres servent à voir l'Homme, même dans l'ennemi, et à rejeter toute forme de déshumanisation."

Un entrepreneur local et opposant au conflit en Ukraine, Dmitri Siline, a ouvert les lieux en juillet 2022 avec l'idée de fournir gratuitement des outils de réflexion pour lutter contre la propagande, la censure et le climat de manipulation ambiant.

Comme tant d'autres, il a fui la Russie peu après, par crainte de finir en prison pour ses prises de position. Mais sa petite bibliothèque, située au rez-de-chaussée d'un bâtiment aux murs et à la toiture défoncés, continue d'exister.

Mme Karasseva présente la collection : des dystopies, des ouvrages sur le goulag, des écrivains contemporains critiques du Kremlin, des manuels soviétiques d'éducation politique et des romans plus légers pour "s'aérer l'esprit".

Aucun de ces livres n'est interdit. Ils peuvent donc être proposés aux lecteurs, même si, en librairie, ceux rédigés par des personnes cataloguées "agents de l'étranger" doivent être vendus dans des emballages cachant leur couverture.

Légalement, Mme Karasseva a aussi toujours le droit d'apporter ses éclairages. "Plus vous lisez de dystopies", dit-elle. "Plus vous avez de liberté : elles vous montrent les dangers, les moyens de les éviter, d'y résister."

- "Oublier la peur" -

La bibliothécaire, col roulé et épaisses lunettes sur le nez, est un puits de science à la prononciation rendue moelleuse par une dentition abîmée. Sa frange blonde lui tombe sans cesse sur les yeux.

Elle parle du chef-d'oeuvre d'Orwell, 1984, qui décrit la tentative de résistance d'un employé du "ministère de la Vérité" dans une dictature extrêmement intelligente dans sa capacité à soumettre et lobotomiser les individus.

Elle évoque l’autodestruction révolutionnaire dans les Démons de Dostoïevski, les dystopies explosives du Russe Vladimir Sorokine, l'antiracisme de l'Américaine Harper Lee, le cri d'humanité de l'Allemand Erich Maria Remarque...

Mme Karasseva indique être une historienne à la retraite, spécialiste de la Rome antique, en particulier "du passage de la République à la dictature".

Puis, sans crier gare, elle partage son analyse du film Barbie ("plus profond qu'il n'y paraît"). Le long-métrage américain a récemment été projeté dans l'unique salle de réunion de la bibliothèque.

Le souriant Dmitri Chestopalov, 18 ans, y était. Ce militant du parti d'opposition Iabloko -- formation opprimée, affaiblie, mais encore légale -- se rend à la bibliothèque pour regarder des films et retrouver d'autres jeunes.

"Ici, on peut grandir, malgré tout ce qui se passe dans notre pays. On peut oublier cette peur, se sentir plus libre, ressentir du confort, sentir qu'on n'est pas seul dans ce système énorme qui nous dévore."

L'avocate Anastassia Roudenko, 41 ans, qui a cofondé la bibliothèque, observe en Russie des "signes" du totalitarisme décrit dans 1984. D'abord, elle ressent cette "peur qui enchaîne".

Ensuite, elle est frappée par la pertinence d'un slogan du livre, "L'IGNORANCE, C'EST LA FORCE", car, d'après elle, les Russes qui "n'essayent pas de comprendre ce qui se passe vivent très bien".

- Amour et dissonance -

Sur la place centrale d'Ivanovo, près d'une plaque à la mémoire de personnes tuées par le pouvoir tsariste lors d'une manifestation antiguerre en 1915, Anastassia Roudenko se livre sur sa "tragédie personnelle", le visage balayé par un vent glacial.

Son frère et son mari, officiers de carrière dans l'armée russe, participent à "l'opération militaire spéciale", l'euphémisme imposé par le Kremlin pour qualifier son attaque contre l'Ukraine.

Elle ne peut s'étendre sur le sujet. La moindre déclaration sensible pourrait valoir une sanction, voire une peine d'emprisonnement. Être avocate ou femme de militaire ne la protège pas.

En juin 2023, la justice l'a condamnée à une amende pour "discrédit" de l'armée en se basant, comme souvent, sur une expertise fumeuse invoquant des messages sur Telegram où elle disait avoir vu un documentaire sur l'opposant Alexeï Navalny.

Son époux a pu venir à l'audience pour la soutenir.

D'origine ukrainienne par son père, Anastassia Roudenko, une femme rieuse et pleine d'énergie, se met soudainement à pleurer quand elle évoque "l'énorme douleur" d'être impuissante face à la guerre déclenchée par Vladimir Poutine.

Mais, elle aime son mari "sans doute encore plus" depuis qu'il est parti combattre. Et à ceux qui la jugeraient pour cette dissonance et se demanderaient pourquoi ils sont toujours ensemble, elle répond : "Et vous, vous auriez fait quoi ?"

Y.Amjad--DT