AEX
13.6800
Greg Kelly a écopé jeudi de six mois de prison avec sursis au terme de son procès pour malversations financières à Tokyo, une première condamnation au pénal dans l'affaire Carlos Ghosn, dont il était un collaborateur chez Nissan avant sa chute.
Cette peine est beaucoup plus légère que les deux ans de prison ferme que les procureurs avaient réclamés à l'encontre de M. Kelly.
Ce juriste américain de 65 ans, ancien responsable des affaires juridiques de Nissan, était devenu par défaut le principal accusé dans ce procès après la fuite au Liban de M. Ghosn fin 2019.
Le constructeur automobile nippon a été condamné à une amende symbolique de 200 millions de yens (1,6 million d'euros), conformément aux réquisitions du parquet.
L'affaire Ghosn avait démarré au Japon par l'arrestation fracassante en novembre 2018 du grand patron de l'alliance Renault-Nissan, libéré sous caution l'année suivante.
Greg Kelly, ancien responsable des affaires juridiques de Nissan, avait été arrêté le même jour que M. Ghosn et pour le même chef d'accusation initial: avoir omis de déclarer pendant des années aux autorités boursières japonaises des rémunérations que le Franco-libano-brésilien devait percevoir ultérieurement de Nissan.
- "Conspirations" de Carlos Ghosn -
Les procureurs lui reprochaient d'avoir aidé M. Ghosn à dissimuler aux autorités boursières japonaises 9,1 milliards de yens (quelque 70 millions d'euros) de rémunérations différées sur la période 2010-2018.
La cour a jugé M. Kelly coupable pour ces faits, mais seulement sur l'exercice 2017/18, estimant qu'il n'était pas au courant auparavant des "conspirations" de M. Ghosn et d'un autre responsable de Nissan à l'époque, Toshiaki Ohnuma, sur ces paiements différés.
M. Ohnuma n'a pas été poursuivi par la justice japonaise, ayant bénéficié d'un statut de lanceur d'alerte.
Durant son procès dont les audiences se sont étalées sur près d'un an et demi, M. Kelly et ses avocats avaient argué que ni les montants ni le calendrier de ces versements n'étaient gravés dans le marbre, et que donc Nissan n'avait nul besoin de publier ces informations.
Nissan cherchait un "moyen légal" de conserver M. Ghosn dans son giron après sa retraite, pour éviter qu'il ne rejoigne un groupe concurrent, avait encore assuré M. Kelly.
Il avait passé un mois en détention provisoire après son arrestation au Japon, et vivait depuis en liberté sous caution avec interdiction de quitter le territoire japonais en attendant la fin de son procès.
- "Trois longues années" -
Ses avocats avaient assuré en amont du verdict qu'il ferait appel en cas de condamnation, même à une peine avec sursis.
"Nous sommes soulagés que la procédure légale soit arrivée à son terme, et que les époux Kelly puissent rentrer chez eux" dans le Tennessee (sud des Etats-Unis), a réagi jeudi dans un communiqué l'ambassadeur américain au Japon Rahm Emanuel, qui suivait cette affaire de près.
"Cela a été trois longues années pour la famille Kelly, mais ce chapitre a pris fin", a ajouté sobrement l'ambassadeur.
"Kelly avait été arrêté dans l'espoir qu'il retourne sa veste et témoigne contre Ghosn", mais après la fuite de ce dernier, les procureurs s'étaient retrouvés "avec un dossier faible et restreint contre Kelly", selon Stephen Givens, un avocat d'affaires à Tokyo interrogé par l'AFP en amont du verdict.
Les juges nippons faisaient face à un "dilemme" car un acquittement aurait été "humiliant" pour les procureurs et pour Nissan, avait encore estimé M. Givens.
Le volet des rémunérations différées ne devait être que le hors-d'oeuvre des procès de M. Ghosn au Japon. Car la justice japonaise voulait également juger le Franco-libano-brésilien pour des accusations d'abus de confiance, qui ne visaient cette fois-ci que lui.
Le magnat déchu de l'automobile reste concerné par deux procédures judiciaires françaises, pour des contrats de prestations de conseil conclus par RNBV, filiale néerlandaise de Renault-Nissan, et pour des abus de biens sociaux et blanchiment.
M. Ghosn, qui clame son innocence sur toute la ligne, fait l'objet d'un mandat d'arrêt d'Interpol à la demande du Japon, mais le Liban n'extrade pas ses ressortissants.
H.Yousef--DT